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Phagothérapie : la nécessaire coopération entre bactériophage et système immunitaire

 

 

 

 

 

 

 

Phagothérapie : la nécessaire coopération entre bactériophage et système immunitaire

COMMUNIQUÉ | 12 JUIL. 2017 - 17H19 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE)

IMMUNOLOGIE, INFLAMMATION, INFECTIOLOGIE ET MICROBIOLOGIE

Deux équipes de l’Institut Pasteur, en collaboration avec des chercheurs de l’Inserm et du Georgia Institute of Technology aux Etats-Unis, viennent de démontrer que, pour garantir la bonne efficacité d’une phagothérapie lors d’une infection bactérienne in vivo, l’action des bactériophages doit s’appuyer sur celle du système immunitaire de l’hôte. Cette synergie repose notamment sur l’action clé des cellules immunitaires neutrophiles. Cette découverte permet de mieux comprendre l’action thérapeutique des bactériophages dans le traitement de certaines infections bactériennes. Ces travaux sont publiés dans la revue Cell Host and Microbe le 12 Juillet 2017.

La phagothérapie repose sur l’utilisation de bactériophages (ou « phages ») pour traiter les infections bactériennes. Les phages sont des virus s’attaquant spécifiquement aux bactéries ; ils sont inoffensifs pour l’homme. Le recours à cette stratégie thérapeutique, conceptualisée il y a 100 ans, a connu un net recul dans le monde occidental, suite au développement des antibiotiques. Cependant, alors que le nombre d’infections causées par des bactéries résistantes aux antibiotiques augmente de façon alarmante, la phagothérapie connait actuellement un regain d’intérêt, notamment en Europe.
Jusqu’à présent, les données scientifiques n’étaient pas suffisantes pour comprendre le fonctionnement de la phagothérapie in vivo. En effet, la plupart des études menées in vitro avaient déjà prouvé que les phages tuent les bactéries qu’ils ciblent spécifiquement, mais aucune de ces études n’avait pu prendre en compte l’importance de la réaction de l’hôte face à cette activité.

Deux équipes de l’Institut Pasteur – le groupe Interactions bactériophages/bactéries chez l’animal de Laurent Debarbieux et l’unité Immunité innée dirigée par James Di Santo (Inserm U1223)  -, en collaboration avec l’équipe de Joshua Weitz au Georgia Institute of Technology (Atlanta, Etats-Unis), viennent de démontrer l’importance du statut immunitaire du patient dans les chances de réussite d’une phagothérapie. Pour ce faire, ils ont mené une double approche originale en combinant un modèle animal et une modélisation mathématique.

Afin d’évaluer l’efficacité d’un traitement par une seule espèce de phages, les chercheurs se sont penchés sur la bactérie Pseudomonas aeruginosa qui est impliquée dans des infections respiratoires comme les pneumonies. Cette bactérie, résistante aux carbapénèmes, les            « antibiotiques de la dernière chance », a été classée par l’OMS parmi les quatre plus menaçantes au niveau mondial pour des phénomènes de résistance aux antibiotiques.
Les chercheurs ont ainsi pu montrer que, chez les animaux avec un système immunitaire sain (dits « immunocompétents »), le traitement par phagothérapie est efficace. Le système immunitaire inné, rapidement mobilisable, et les phages agissent, dans un premier temps, en parallèle pour lutter contre l’infection. Puis, au bout de 24 à 48 heures, certaines bactéries deviennent naturellement résistantes aux phages qui ne peuvent plus assurer leur rôle. Le système immunitaire inné prend alors en charge la destruction de ces bactéries. Parmi les cellules immunitaires impliquées, les polynucléaires neutrophiles (des globules blancs provenant de la moelle osseuse) tiennent une place prépondérante.
Parallèlement, les simulations in silico ont permis de démontrer que la réponse innée doit assurer entre 20% et 50% de la destruction des bactéries afin que le traitement par phagothérapie soit efficace, et ce en l’absence ou bien en présence de phénomènes de résistance aux phages. Ainsi, sur le modèle étudié, les chercheurs ont prouvé qu’en aucun cas les phages seuls peuvent éradiquer une infection à P. aeruginosa.
Ces résultats sont d’autant plus importants qu’ils indiquent que les traitements par phagothérapie devraient prendre en compte le statut immunitaire des patients. Comme l’explique Laurent Debarbieux, « en termes de conséquences cliniques, il faudra probablement envisager la sélection des patients susceptibles de bénéficier d’un tel traitement. En effet, la phagothérapie pourrait ne pas être appropriée ou recommandée pour des personnes en situation d’immunodéficience sévère ».

Les chercheurs entendent maintenant décrypter précisément les voies immunitaires impliquées et les mécanismes sous-jacents. En parallèle, des essais cliniques sont en cours, notamment l’essai Phagoburn financé par le 7ème programme cadre de l’Union européenne, sur des infections cutanées chez de grands brûlés.

 

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Effets du lithium sur le cerveau dans le traitement du trouble bipolaire : vers la confirmation d’un mécanisme d’action

 

       

 

 

 

 

 

Effets du lithium sur le cerveau dans le traitement du trouble bipolaire : vers la confirmation d’un mécanisme d’action

COMMUNIQUÉ | 08 AVRIL 2019 - 17H00 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE)

NEUROSCIENCES, SCIENCES COGNITIVES, NEUROLOGIE, PSYCHIATRIE


 Une collaboration entre le CEA, l’INSERM, l’Institut Pasteur, la Fondation FondaMental, les Hôpitaux Universitaires Henri-Mondor AP-HP et le Centre Hospitalier Universitaire de Grenoble, apporte un nouvel éclairage sur l’action du lithium dans le traitement des troubles bipolaires. La modélisation  de la diffusion de l’eau (NODDI[1]), mesurée par IRM, a permis d’analyser  la microstructure cérébrale de patients souffrant de troubles bipolaires. Les résultats indiquent une densité dendritique augmentée dans le  des patients traités par lithium. Ils étayent l’hypothèse selon laquelle une amélioration de la plasticité du cerveau et de la communication entre neurones dans cette région du cerveau aurait des effets bénéfiques du lithium dans le traitement des troubles bipolaires. Ces résultats sont publiés dans le journal « Psychotherapy and Psychosomatics » le 5 avril 2019.

Les résultats de cette étude permettent de confirmer que la prise régulière de lithium est associée à une plasticité bénéfique de la matière grise, mais est surtout la première à permettre d’en préciser l’origine à l’échelle microscopique grâce à la simulation numérique. Ces premiers résultats, qui nécessitent d’être reproduits, suggèrent qu’une amélioration de la communication entre neurones dans cette région pourrait étayer l’hypothèse selon laquelle le lithium aurait des effets bénéfiques dans le traitement des troubles bipolaires. Au-delà, ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives très intéressantes pour d’autres pathologies neurologiques ou psychiatriques.

Augmentation de la densité des dendrites.
Les données d’imagerie par résonance magnétique de diffusion (voir encadré) acquises chez 41 participants souffrant de troubles bipolaires et suivis au sein du service de psychiatrie de l’hôpital Henri-Mondor AP-HP et du Centre Hospitalier Universitaire de Grenoble, dont l’expertise clinique est appuyée par celle des centres experts des Troubles Bipolaires de la fondation FondaMental, ont été comparées aux mêmes données recueillies chez 40 volontaires sains issus des deux centres.  
Les résultats de l’étude montrent que les patients traités par lithium ont une densité des dendrites plus importante dans la région frontale en comparaison aux patients ne prenant pas de lithium. Les dendrites sont des prolongements des corps cellulaires des neurones recevant l’information transmise par leurs voisins. Le niveau de densité dendritique semble être identique chez les sujets sains et chez les patients traités par lithium alors que le niveau de densité dendritique dans cette région frontale reste inférieur chez les patients non traités par lithium.

Le lithium est un traitement utilisé depuis près d’un siècle chez les patients souffrant de trouble bipolaire et reconnu comme le meilleur stabilisateur de l’humeur. Bien que son efficacité ne soit plus à prouver, les mécanismes biologiques de son action thérapeutique sur le cerveau restent encore mal connus, supposés multiples, et semblent notamment agir sur le tissu en lui-même en entraînant une préservation, voire une augmentation du volume de la matière grise. Jusqu’à présent, il n’était pas possible de qualifier ou quantifier quels changements s’opéraient à l’échelle microscopique.

Repère
Le trouble bipolaire est un trouble psychiatrique qui touche 1 % de la population mondiale, soit près de 80 millions de personnes dans le monde et 700 000 en France.

 
Apport de l’IRM de diffusion et de la modélisation
L’émergence de nouvelles techniques d’imagerie par résonance magnétique capables de rendre compte de l’organisation du tissu cérébral à l’échelle microscopique (aussi appelée microstructure) permet aujourd’hui de cartographier directement le cerveau à l’échelle microscopique. Cette nouvelle approche repose sur l’observation par IRM du déplacement des molécules d’eau dans le cerveau (communément appelé processus de diffusion), déplacement largement perturbé par la présence des cellules au sein du tissu cérébral. Ces perturbations du mouvement de l’eau induisent à leur tour une modification du signal IRM qui est propre à l’organisation cellulaire sous-jacente. Grâce à un modèle mathématique nommé NODDI, il est devenu possible d’analyser les données d’IRM de diffusion acquises chez les patients adultes et de déterminer les propriétés microscopiques du tissu. Cette nouvelle méthode, disponible sur la plateforme d’imagerie par résonance magnétique du centre NeuroSpin, a ainsi permis de caractériser les propriétés microscopiques de la substance grise de patients souffrant d’un trouble bipolaire et de les comparer à ceux de sujets sains.

 

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Les calpaïnes, enzymes cellulaires clés pour la lutte anti-grippale

 

 

 

 

 

 

 

Les calpaïnes, enzymes cellulaires clés pour la lutte anti-grippale

COMMUNIQUÉ | 16 FÉVR. 2016 - 10H07 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE)

IMMUNOLOGIE, INFLAMMATION, INFECTIOLOGIE ET MICROBIOLOGIE

Pourquoi ne pas combattre le virus de la grippe en bloquant la machinerie cellulaire qu’il utilise pour se répliquer ? Des chercheurs de l’Inserm (Unité 1100 “Centre d’Etude des Pathologies Respiratoires”), de l’Institut Pasteur et du pôle de recherche Pasteur-Université de Hong Kong ont testé cette hypothèse en ciblant spécifiquement les calpaïnes, des protéases impliquées dans les mécanismes inflammatoires. Leurs résultats, obtenus chez l’animal, montrent que l’inhibition de ces enzymes peut réduire les symptômes de la maladie mais aussi prévenir l’infection par les virus de la grippe saisonnière ou pandémique.

Les données de cette étude ont été publiées dans l’American Journal of Physiology, Lung Cellular and Molecular Physiology en janvier 2016.

Les conséquences cliniques de la grippe résultent surtout de l’inflammation dérégulée du tissu pulmonaire, qui peut provoquer des lésions sévères, voire mortelles. Le Centre d’Etude des Pathologies Respiratoires et les équipes associées ont montré que ce processus inflammatoire pouvait être inhibé en bloquant les calpaïnes, des protéases présentes au sein des cellules hôtes. Le blocage de ces enzymes pourrait jouer un rôle-clé dans la lutte antigrippale : chez la souris, l’inhibition des calpaïnes permet de limiter l’infection par un virus de la grippe saisonnière (H3N2) ou pandémique (H5N1).
«Il existe deux calpaïnes exprimées de manière ubiquitaire dans l’organisme, la calpaïne 1 et la calpaïne 2 », précise le directeur de l’Unité Inserm 1100, Mustapha Si-Tahar. « Elles sont très étudiées car elles joueraient un rôle notable dans différents processus physiopathologiques, comme la neuro-dégénérescence, la dystrophie musculaire ou le diabète. Les différents travaux qui ont permis de décrypter leurs fonctions ont montré que ces protéases jouaient aussi un rôle dans la cascade inflammatoire, selon un mécanisme calcium-dépendant. Or, le virus de la grippe accroît le calcium intracellulaire et la réponse inflammatoire.»

Les travaux conduits par son équipe montrent que les calpaïnes sont activées au cours de l’infection grippale. A l’inverse, leur inhibition réduit la capacité du virus à se répliquer dans les cellules épithéliales respiratoires– qu’elles soient murines ou humaines.

Elle réduit également l’intensité de la réponse inflammatoire néfaste et accroît le taux de survie de l’hôte infecté.
Ces résultats apportent de nouvelles perspectives dans la lutte contre la grippe : le blocage de la machinerie des cellules de l’hôte serait en effet une alternative intéressante car il limiterait la pression sélective des traitements anti-grippaux et donc l’émergence de souches virales résistantes. L’enjeu est de taille : la grippe saisonnière constitue un problème de santé publique avec 2500 à 3500 décès chaque année en France. En outre, certaines épidémies de grippe peuvent conduire à une forte surmortalité comme en 2015 avec plus de 18000 décès enregistrés sur le territoire et les pandémies grippales pourraient avoir des conséquences encore plus graves, à l’image de la grippe espagnole qui tua plus de 50 millions de personnes entre 1918 et 1919.
Les chercheurs souhaitent maintenant approfondir deux aspects : le rôle respectif des deux formes de l’enzyme et la nature précise des mécanismes moléculaires régissant l’interaction calpaïnes – virus grippal. Ces travaux permettront de confirmer le potentiel thérapeutique des calpaïnes.

 

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Trouble de l'attention chez l'enfant : reconnaissance officielle

 

 

 

 

 

 

 

Trouble de l'attention chez l'enfant : reconnaissance officielle
Le mardi 17 février 2015

La Haute Autorité de Santé s'est prononcée jeudi en faveur de la reconnaissance du Trouble Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité (TDAH). Ce trouble toucherait entre 3,5% et 5,6% d’enfants.
Dans un document publié le 12 février 2015, la Haute Autorité de Santé (HAS) a indiqué ses recommandations concernant le Trouble Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité (TDAH). Elle y reprend un ensemble de symptômes déjà listés dans la « bible des psychiatres », le manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux (DSM-V) : déficit de l’attention, impulsivité et hyperactivité motrice. L’objectif : aider les médecins à établir un diagnostic le plus précoce possible. Concernant le traitement préconisé, la priorité est donnée aux prises en charge psychologiques, pédagogiques et sociales. L’emploi de médicaments n’est envisagé au contraire qu’en dernier recours. La HAS recommande dans ce cas le méthylphénidate, plus connu sous le nom de Ritaline. Un traitement qui fait polémique auprès des psychiatres, comme le montrent ces entretiens avec Marie-France Le Heuzey, pédopsychiatre à l'hôpital Robert-Debré, et Maurice Corcos, pédopsychiatre et psychanalyste à l'institut mutualiste Montsouris, parus en 2012 dans un numéro de La Recherche consacré aux troubles mentaux.

« Nous devons soigner la souffrance enfantine » Entretien avec Marie-France Le Heuzey, pédopsychiatre à l'hôpital Robert-Debré.
LA RECHERCHE : Vous soignez beaucoup d'enfants atteints d'un trouble de déficit de l'attention-hyperactivité (TDAH). Que répondez-vous à ceux qui s'inquiètent d'une médicalisation excessive des enfants « agités » ?
MARIE-FRANCE LE HEUZEY : Je leur dis qu'il y a confusion et qu'un enfant porteur de ce trouble n'est pas simplement agité. Il est bien précisé dans le DSM-IV (lire « La médicalisation des émotions banales », p. 44) qu'un enfant qui souffre d'un trouble avec déficit de l'attention-hyperactivité peut présenter trois grands types de symptômes : l'impulsivité, l'inattention et l'hyperactivité. Selon la forme clinique, il peut avoir tous ces symptômes ou prédominance de l'un ou l'autre d'entre eux. Dans une forme à inattention prédominante, l'enfant est peu, voire pas agité du tout. En revanche si l'hyperactivité prédomine, l'enfant est extrêmement agité, à l'école, à la maison au centre de loisirs, partout. C'est un véritable handicap et une cause de souffrance pour cet enfant qui ne parvient pas à se contrôler.

L'essentiel des critiques porte sur le fait qu'on donnerait trop facilement à ces enfants un médicament psychostimulant de la famille des amphétamines, la Ritaline. Qu'en pensez-vous ?
M.-F. L.H. Dans de nombreux cas on pose le diagnostic de TDAH sans prescrire de Ritaline. Je sais qu'il y a des détracteurs qui disent qu'on prescrit trop mais ce n'est pas mon avis. On a fait beaucoup de progrès dans le repérage du trouble de déficit de l'attention-hyperactivité. Si les prescriptions augmentent c'est parce que le diagnostic est enfin fait ! Je prescris de la Ritaline depuis plus de trente-cinq ans. À l'époque nous n'étions pas nombreux en France à en donner parce que ce trouble était peu reconnu. Je prescris selon les recommandations internationales, en fonction des besoins de l'enfant. Je ne fais jamais de prescriptions de complaisance. Pour dire vrai, je ne comprends pas ce débat. Quand un enfant est épileptique ou diabétique on lui prescrit le traitement antiépileptique ou antidiabétique dont il a besoin. On ne se pose pas toutes ces questions.
En 2005 vous avez participé à une expertise collective de l'Inserm qui préconise un dépistage précoce des troubles des conduites. Cette étude a suscité la création d'un collectif de professionnels de la santé et du travail social qui dénonce une « médicalisation du mal-être social » et un risque de « dérives à des fins normatives et de contrôle social ». Que répondez-vous à ces critiques ?
M.-F. L. H. C'est de la mauvaise foi : la plupart n'avaient pas lu les quatre cents pages du rapport. Notre propos n'était pas de dépister les troubles du comportement chez l'enfant de 3 ans mais de repérer les enfants vulnérables. Cette vulnérabilité est multifactorielle. Une part est génétique et s'exprime, ou pas, en fonction des facteurs environnementaux, du vécu de la petite enfance, de l'histoire transgénérationnelle. L'anorexie mentale, par exemple, augmente du fait de la culture de la minceur, des luttes contre l'obésité, de la mode des Lolita... Les comportements de dépression, les comportements suicidaires, les violences, l'agressivité, tout cela augmente et rajeunit, c'est indéniable. Et on sait bien que des enfants dont la mère est toxicomane, le père en prison ou qui vivent à huit dans un studio mal chauffé... risquent d'aller très mal à l'adolescence, s'ils ne sont pas pris en charge très tôt par les services sociaux. Pour cela, il faut bien les repérer. D'ailleurs, les médecins et les infirmières scolaires font déjà ce travail de repérage. Il était juste question de l'organiser. On a dit de notre expertise qu'elle visait à dépister les futurs délinquants mais c'est faux. Il s'agissait seulement de repérer ces enfants pour leur proposer un accompagnement adapté. C'est la seule façon de diminuer le risque de troubles des apprentissages et du comportement. Quand on voit les problèmes de violence, d'addiction ou de risque suicidaire auxquels nous sommes confrontés avec nombre d'adolescents et qu'on remonte dans leur histoire, on se dit que si l'on avait pu mieux aider leurs parents à les élever, on n'en serait peut-être pas là.

La classification américaine des troubles mentaux a récemment ajouté le trouble bipolaire à la liste des troubles psychiatriques pouvant survenir chez le jeune enfant, alors qu'il était jusqu'ici réservé à l'adulte. Êtes-vous d'accord avec cette nouvelle vision des choses ?
M.-F. L. H. On a toujours considéré que le trouble bipolaire, que l'on appelait autrefois la psychose maniaco-dépressive, pouvait exister chez l'enfant. On voit parfois des enfants en état maniaque mais c'est très rare. La manie se traduit par une exaltation de l'humeur, une fuite des idées, avec des thèmes de grandeur ou sexuels, et une insomnie permanente. Ces manifestations sont très caractéristiques, elles ne ressemblent pas à un « délire » enfantin normal. Il est possible qu'aux États-Unis les psychiatres diagnostiquent plus de troubles bipolaires. Mais, en France, cela reste extrêmement rare parce qu'on ne pose ce diagnostic qu'en présence d'une symptomatologie « bruyante ». Je me souviens par exemple d'une petite fille très bien élevée, sans problèmes antérieurs qui, entre autres symptômes, interrogée au tableau s'était mise à « draguer » son instituteur en lui disant qu'il était beau et en portant la main à son entrejambe.

Certains chercheurs et psychiatres prétendent que l'augmentation des troubles mentaux chez l'enfant doit beaucoup à l'industrie pharmaceutique qui orienterait l'évolution de la classification DSM ?
M.-F. L. H. Le DSM est une classification internationale qui permet un langage commun entre tous les psychiatres. Il se contente de décrire des symptômes, sans s'intéresser aux mécanismes des maladies et sans donner de recommandations thérapeutiques. C'est pourquoi je pense que ceux qui prétendent que le DSM est sous-tendu par l'industrie pharmaceutique ont une vision tendancieuse.
« On surtraite l'hyperactivité » Entretien avec Maurice Corcos, pédopsychiatre à l'institut mutualiste Montsouris, psychanalyste.
LA RECHERCHE : Les enquêtes montrent qu'un nombre croissant d'enfants seraient atteints de troubles mentaux. Y a-t-il réellement plus d'enfants malades ou les diagnostique-t-on davantage ?
MAURICE CORCOS : Sur le fait qu'il y ait ou pas davantage d'enfants souffrant de maladies psychiques, les avis sont partagés mais cela n'explique pas l'expansion des chiffres. L'élément central est la modification des critères de diagnostic. Par exemple, le DSM-IV ne parle plus d'autisme mais de « troubles du spectre autistique », ce qui inclut un grand nombre de troubles qui auparavant n'étaient pas aussi strictement apparentés à l'autisme : comme les troubles sévères de l'organisation des fonctions cognitives ou du langage et d'autres pathologies du développement qui peuvent parfois évoluer vers l'autisme.
Pour l'hyperactivité avec déficit attentionnel, c'est pire puisque, aux États-Unis, le nombre de cas a augmenté de 600 % en six ans. Même si on a des éléments pour mieux dépister les véritables troubles hyperactifs, c'est impossible. Force est de constater que d'autres raisons entrent en jeu. Des raisons sociétales et d'après certains, dans ce cas précis, des conflits d'intérêts majeurs avec l'industrie pharmaceutique.

Voulez-vous dire que l'industrie pharmaceutique aurait inventé le TDAH dans le but de faire consommer des médicaments aux enfants ?
M. C. Non, je ne dis pas que ce trouble n'existe pas, ni que son traitement n'est pas très utile dans les cas avérés. Ce que je dis, c'est que, lorsqu'on a dans certaines écoles aux États-Unis ou au Canada près de 20 % des enfants d'une classe d'âge qui sont sous traitement, on peut craindre que le système se soit emballé.
Concernant ce TDAH, sommes-nous en train d'assister en France aux mêmes dérives qu'aux États-Unis ?
M. C. Oui, nous sommes en train de prendre exactement le même chemin. On « surdiagnostique » et on « surtraite » l'hyperactivité avec des médicaments dont on ne connaît pas les effets indésirables à long terme. Et surtout, des médicaments dont on sait très bien aujourd'hui qu'ils n'ont aucun impact sur ce qu'on voulait prévenir, c'est-à-dire la délinquance, les troubles des apprentissages, etc.

Que pensez-vous de l'extension à l'enfance du trouble bipolaire, autrefois défini comme débutant à l'adolescence ?
M. C. Il est vrai que la psychose maniaco-dépressive, comme on nommait autrefois ce trouble, a été longtemps sous-estimée chez l'adolescent et que des erreurs ont été commises. Nous avions tendance à les prendre trop rapidement pour des schizophrènes. Du coup, le traitement n'était pas adapté à leur problème. Mais depuis dix ans c'est l'inverse, nous en diagnostiquons trop. En particulier des patients qui sont plutôt dans des états limites. Joseph Blader et Gabrielle Carlson, de l'université Stony Brook, à New York, ont révélé qu'entre 1994 et 2003, en pédopsychiatrie, le nombre d'enfants étiquetés trouble bipolaire a été multiplié par quatre. En ce qui concerne la petite enfance, nos collègues anglo-saxons sont en train d'en revenir. Ils viennent de décider de ne pas inclure le trouble bipolaire infanto-juvénile dans le prochain DSM.

Un autre trouble, le syndrome de risque psychotique, qui n'existait pas jusqu'à présent, devait faire son entrée dans la prochaine version du DSM. Mais il a déclenché une vive polémique parmi les pédopsychiatres. Où en est-on ?

M. C. Tout est parti de l'idée de savoir si, à partir de troubles repérables dans l'enfance, il était possible de dépister un mode d'entrée dans la psychose et de traiter les enfants préventivement. Il n'a été mis en évidence que des signes peu spécifiques : des étrangetés, des dyscalculies, des dyspraxies*... rien de déterminant. Ce qui n'a pas empêché certains psychiatres de mettre les enfants présentant ce type de bizarreries sous neuroleptiques et de les étiqueter « à risque mental ».
Or, aucune étude de terrain n'a aujourd'hui prouvé l'efficacité des traitements utilisés dans la prévention de ce syndrome (neuroleptiques). Devons-nous assumer que bon nombre d'enfants et de préadolescents auront subi un traitement inutile et dangereux ? Cette attitude a déclenché une levée de boucliers dans la profession. Finalement, ce syndrome ne figurera pas dans la cinquième version du DSM.

Est-ce qu'on assiste au même phénomène avec la dépression des adolescents ?
M. C. On sait qu'aux États-Unis l'augmentation du nombre de diagnostics de dépression à l'adolescence a été considérable. Parmi les jeunes qui consultent dans les centres de santé de 25 % à 50 % sont mis sous antidépresseurs. Or, de nombreuses études ont montré que les effets de ces médicaments donnés aux adolescents censés être déprimés ne sont pas supérieurs à ceux des placebos*, surtout si ces placebos ont des effets secondaires. D'ailleurs la FDA et l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé recommandent de ne plus donner ces traitements en première intention dans la dépression de l'enfant et de l'adolescent. Malgré cela, les prescriptions se poursuivent aux États-Unis et en France.

Que préconisez-vous pour éviter cette dérive ?
M. C. Il faut revenir à un enseignement clinique de terrain et ne pas laisser entendre que le DSM est la nouvelle clinique. Qu'il redevienne ce qu'il est au départ : une classification de recherche. Nous avons dix à vingt ans de retard sur nos collègues anglo-saxons : pourquoi ne pas rattraper ce retard en nous dispensant de faire les mêmes erreurs qu'eux, d'autant qu'ils sont en train de les corriger.
Photo : © JPDN/SIPA

 

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