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LE NOMBRE D'OR

 

 

 

 

 

 

 

nombre d'or

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Au cours des siècles, une littérature prolixe s'est attachée au nombre d'or. Ce nombre apparaît, aux yeux de certains, comme un principe d'harmonie universelle régissant le microcosme et le macrocosme, ou comme la clé d'une conception absolue de la beauté — conception qui a trouvé, à certaines époques, une application chez les peintres dans la " construction " de la surface picturale, un peu à la manière dont les architectes en ont usé parfois pour leurs plans et leurs élévations. En ce cas, l'expression section d'or sera employée pour traduire la notion euclidienne du partage géométrique en moyenne et extrême raison, tandis que le nombre d'or en représentera l'aspect spéculatif. C'est lui qui, dès l'Antiquité, se pare de significations mystiques, esthétiques, ésotériques, et dont nous retrouvons un écho dans le vocabulaire des théoriciens de la Renaissance : divine proportion, nombre d'or, section divine, section d'or.

Depuis les temps antiques, la section d'or apparaît comme la façon la plus logique de partager asymétriquement une droite selon les principes d'économie et d'harmonie. Euclide en donne la définition dans son Sixième Livre : " Une droite est dite coupée en extrême et moyenne raison quand la droite entière est au plus grand segment comme le plus grand est au plus petit. " Si a et b sont ces deux parties, on doit avoir :
a + b / a = a / b. D'où : a / b = √5 + 1 / 2 = 1,618...
Le nombre d'or, quotient d'un rapport, est donc égal à √5 + 1 / 2 ou 1,618...
On peut remarquer que ce nombre, comme toutes les irrationnelles, peut être construit, c'est-à-dire géométriquement figuré avec un compas et une équerre.
Ce nombre se retrouve dans les figures géométriques dérivées du pentagone (en particulier le pentagramme) et du dodécagone. Amplifié dans l'espace, le pentagone régulier donne le dodécaèdre et l'icosaèdre, 2 des 5 corps platoniciens.
Quelles sont les origines du nombre d'or ? Elles semblent remonter aux pythagoriciens. Dès le vie s. av. J.-C., cette confrérie, milieu d'intense culture mathématique, semble avoir attiré les esprits curieux de science et les mystiques. En fait, nos connaissances concernant cette secte se ressentent de la règle du secret qui accompagnait une longue initiation de cinq ans. D'après Lucien, le pentagramme, symbole du nombre d'or, aurait été le signe de ralliement des initiés. " Tout est arrangé d'après le nombre ", tel aurait été le fondement de leur philosophie, qui peut-être remonterait à l'ancienne Égypte. Cependant, que savons-nous de tout cela ? Si Pythagore a donné son nom à une doctrine, il n'a lui-même laissé aucun écrit, et pourtant au cours des siècles, les écrivains seront intarissables sur son compte en donnant une envergure considérable à une pensée déjà si riche par elle-même. L'expression " le Maître l'a dit " avait une valeur absolue et suffisante pour ses disciples et les adeptes de sa doctrine jusqu'au Moyen Âge.
Aussi, dès son origine, le nombre d'or revêtira-t-il un caractère mystique, esthétique, ésotérique, que nous retrouverons tout au long de son histoire.
De cette doctrine, Platon, qui semble avoir eu des rapports intéressants avec les milieux pythagoriciens, paraît nous avoir donné un reflet. Pour lui, le nombre est facteur d'ordre, de mesure, de beauté, que seul le philosophe nourri de mathématiques sait apercevoir. Le Timée nous livre ses conceptions sur l'harmonie et la proportion, en particulier sur la " médiété " géométrique, le lien le plus fort qui puisse unir trois termes : " Mais que deux termes forment seuls une belle composition, cela n'est pas possible sans un troisième [...], il arrive ainsi nécessairement que tous les termes aient la même fonction, que tous jouent les uns par rapport aux autres le même rôle et dans ce cas tous forment une unité parfaite " (le Timée, 31 c-32 a ). Nous retrouvons donc ici la définition de la proportion " dorée ". Un peu plus loin, pour expliquer sa cosmogonie, il reprend le dodécaèdre pythagoricien (12 pentagones), impossible à réaliser sans la section d'or et dont il fait le symbole de l'harmonie cosmique : " Le Dieu s'en servit pour le Tout, quand il en eut dessiné l'arrangement final " (le Timée, 55 c ). Avec Platon, nous retrouvons l'aspect spéculatif, qui demeurera l'un des signes les plus typiques de l'usage pratique.
Quant au mathématicien Euclide, dans ses Éléments, il revient un siècle plus tard, à quatre reprises, sur le partage en moyenne et extrême raison (liv. II, prop. 11 ; liv. IV, prop. 10-14 ; liv. VI, prop. 30 ; liv. XIII). Ce livre et tout l'héritage mathématique grec seront sauvés par les Arabes. Des auteurs tels que Nicomaque de Gérasa (ier s. apr. J.-C.) et Boèce (vie s. apr. J.-C.) nous en donnent aussi un reflet. Durant le Moyen Âge, ce sont les confréries de bâtisseurs qui transmettent la géométrie ésotérique pythagoricienne.

Dès 1228, Léonard de Pise (Fibonacci), qui écrit le premier traité d'algèbre, découvre également une série additive dans laquelle 2 chiffres consécutifs forment un rapport qui tend vers le nombre d'or : 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, 89, 144... Un siècle plus tard, Campanus de Novare est sans doute le premier artisan du retour à Euclide, qu'il traduit et commente d'après une version arabe. Son livre, achevé en 1354, est imprimé à Venise en 1482. Dans de nombreux passages, il considère le nombre d'or dans une optique mathématique. Plus tard, c'est à la lumière de ces commentaires et de l'étude de Platon que Luca Pacioli, moine bolonais, compose son traité De divina proportione, paru à Venise en 1509, et non sans rapport avec le Traité des corps réguliers de Piero della Francesca, comme on l'a remarqué. Pacioli avance diverses raisons pour nous expliquer le choix de son titre. Cette proportion, apparentée à Dieu, est divine : comme lui, elle ne peut être définie de façon certaine, puisque irrationnelle ; comme lui, elle est toujours présente de façon invisible ; comme lui, elle est une, unique, invariable. Pacioli cite le Timée et insiste sur la nécessité de cette proportion sainte qui unit les 5 corps platoniciens. Léonard de Vinci les représentera sur les planches de l'ouvrage.
La peinture est alors une satisfaction de l'esprit doublée d'un contentement de l'œil, " cosa mentale ", pour reprendre l'expression de Léonard, qui, comme tous les gens instruits de son époque, s'attache à la géométrie. Aussi conseille-t-il à ses lecteurs : " Ne lise pas mes principes qui n'est pas mathématicien. " Albert Dürer, au cours de l'un de ses voyages à Venise, au début du xvie s., se rendit à Bologne, où résidait Pacioli, pour se faire initier " aux arcanes d'une perspective secrète ". Il est également l'auteur d'un Traité des proportions. Mais si nous connaissons mal quels rapports existent entre l'usage de la proportion dorée et les spéculations sur les proportions du corps humain, nous constatons qu'elles se sont attachées au problème des rapports proportionnés du corps à partir d'éléments anatomiques essentiels. Les humanistes de la première Renaissance redécouvrent librement l'architecture grecque et romaine et la philosophie géométrique de Platon. Ils posent leurs problèmes en essayant de les situer dans le contexte de l'Antiquité, dont ils se prétendent les successeurs. L'emploi des mathématiques ennoblit la peinture en lui conférant un aspect plus spéculatif dans la mesure, surtout, où l'organisation d'un " dessin " d'ensemble est commun à tous les arts, techniquement et théoriquement.
" Puis la nuit se fait de nouveau sur les porteurs de torche ", affirme l'écrivain Ghyka, qui a étudié le nombre d'or au xxe s. Mais cet oubli n'est qu'apparent. Il serait dû aux progrès des sciences exactes. Euclide fait d'ailleurs l'objet de nombreuses éditions françaises, dont peut-être bénéficie notamment Poussin. Mais que conclure sans les témoignages scripturaires, pratiquement inexistants ?
Les théoriciens du xixe s. retrouvent l'intérêt extra-mathématique de la section d'or. Ils considèrent celle-ci comme la loi fondamentale qui imprègne la nature et les arts, et rejoignent les courants scientiste, mystique et théosophique du Symbolisme de la seconde moitié du siècle, qui influenceront souvent les artistes. Ainsi, Seurat, qui se formera dans un climat scientiste, développe-t-il une œuvre où l'origine de toute sensation d'harmonie est due aux nombres. " L'art, c'est l'harmonie. L'harmonie, c'est l'analogie des contraires, l'analogie des semblables " (lettre à Maurice Baubourg, 1890). Les théoriciens de la Renaissance — Ficin, Pacioli, Palladio — sont à l'origine de ces propos. Dans les toiles de Seurat, les personnages seront placés en général sur la section dorée, et c'est en ces termes que Lhote analysera la Parade.

À partir de 1885, en opposition à ce courant, se crée le Symbolisme. L'influence de Moreau s'étend non seulement aux Nabis, mais aussi au groupe ésotérique des Rose-Croix, dont le chef, le sâr Peladan, traduit le Traité de la peinture de Léonard, livre qui influencera Jacques Villon. En 1890, l'ouvrage de Schuré les Grands Initiés connaît un succès considérable. La doctrine de Pythagore et particulièrement la science des nombres sacrés y sont exposées en une centaine de pages. À la même époque, une esthétique religieuse, à tendance pythagoricienne, fondée sur les mathématiques, le nombre, la géométrie, voit le jour à l'abbaye bénédictine de Beuron. Le père Didier Lenz révèle au novice Jan Verkade, ami de Gauguin et de Sérusier, le dessin du nombre, de l'équilibre et de l'ordre.
Sérusier s'enthousiasme pour cette esthétique, qui lui permet d'atteindre " un art plus grand, plus sévère, et sacré ". Il fait des compositions, des figures nues avec la règle, les équerres et le compas de proportion réglé sur le nombre d'or. Son enseignement à l'Académie Ranson contribue à répandre l'usage des " saintes mesures ". Aussi, Sérusier put-il se proclamer le père du Cubisme, dont la première exposition fut placée sous le signe de la Section d'or (oct. 1912). Cette exposition était la suite logique du groupe de Puteaux, qui réunissait chez les frères Duchamp, passionnés de mathématiques, des artistes tels que Gleizes, Metzinger, Léger, Picabia, La Fresnaye, Apollinaire. L'organisation de la toile était le principal sujet de discussion : " L'idée s'est ancrée en nous qu'une toile devait être raisonnée avant d'être peinte ", avoue Villon, qui représente le meilleur exemple de l'emploi de la section d'or, transfiguré par un chromatisme délicat et subtil.
André Lhote, par son enseignement et ses livres, contribue à faire connaître les lois auxquelles doit " obéir l'œuvre d'art pour échapper au débraillé sentimental ". Le Traité du paysage insiste sur la composition du tableau " pour solliciter ou retenir le regard ". La division de la surface selon le nombre d'or possède le plus de vertus. Il essaie d'atteindre le Beau idéal platonicien, et les règles vont l'y aider, pense-t-il.

L'ouvrage de Severini, paru en 1921, Du cubisme au classicisme, porte un sous-titre révélateur de l'état d'esprit de l'artiste : Esthétique du compas et du nombre. Severini estime indispensable la connaissance de la géométrie pour construire une toile et revient aux idées de la Renaissance : le but suprême de l'art est de reconstruire l'Univers selon les lois mêmes qui le régissent.
" Or, comme l'homme procède de la fonction dans son corps, dans la dimension de ses membres... ", Le Corbusier intègre la section d'or dans son fameux Modulor. Dans sa villa de Garches, il se sert de la diagonale comme élément de proportion. À l'heure actuelle, un peintre comme Agam emploie le nombre d'or en se servant d'un ordinateur pour définir les rapports entre les formes. Il obtient alors différentes combinaisons qui incorporent le temps (quatrième dimension) à l'œuvre.
Un problème se pose dès lors : ces artistes — qui se réfèrent toujours plus ou moins à Léonard, qui, lui, ne parle pas de la section d'or — ne sont-ils pas plutôt attachés à un mythe créateur, véritable garant de la composition ? L'usage du nombre d'or apparaît d'ailleurs chez certains peintres au moment où ils sont attirés par des personnalités typiques du quattrocento, tels Uccello et Piero della Francesca. Et bien des artistes n'ont-ils pas superposé leur propre point de vue à des exemples anciens, sous prétexte de renouer avec une famille spirituelle dont la définition historique n'est pas toujours bien donnée ? Et cette faveur dont jouit parfois au xxe s. le nombre d'or ne semble-t-elle pas due à l'abandon d'un espace perspectif ou tout au moins à la volonté de développer une organisation plus rigoureuse de la surface ?

Mais certains théoriciens, plaquant trop souvent des schémas mentaux sans partir d'une observation directe du document du passé, ont poussé très loin leur analyse et proposent des structures auxquelles les artistes n'avaient sans doute jamais pensé. Peut-on être bien assuré qu'il s'agisse de l'usage véritable de la section d'or dans telle composition de Raphaël, de Titien ou de Véronèse ? Sans doute, bien des schémas proposés nous offrent des coïncidences troublantes, pas toujours suffisantes. En revanche, bien des peintres présents se sont immédiatement emparés de ces études pour leur propre création.
Étape d'une culture, l'usage du nombre d'or semble avoir proposé fréquemment un mythe créateur à qui avait besoin de traduire une conception particulière de l'harmonie. Dans bien des cas aussi il a pu devenir une méthode d'école, une déformation pédagogique, mais plus facilement en peinture qu'en architecture. Aujourd'hui, des spéculations mathématiques comme celles d'un Xénakis semblent avoir ouvert, par rapport à des formes artistiques nouvelles, une quête différente, bien que toujours associée à l'idée d'une structure supérieure.

 

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Les flux sanguins en équations et en images

 

 

 

 

 

 

 

Les flux sanguins en équations et en images

jeudi 13 juillet 2017
Des collègues du laboratoire de mathématiques de Reims se sont intéressés à la simulation de la circulation des flux de liquides biologiques, notamment le sang dans les artères et les veines cérébrales.

Ce projet a impliqué une collaboration forte entre mathématiciens, informaticiens et physiciens ; il a réuni plusieurs équipes au niveau national dont le LMR, l’IRMA, le LJK, pour les mathématiques, ainsi qu’une entreprise innovante en logiciel libre pour l’imagerie médicale (Kitware SAS).
La formulation des équations qui régissent le mouvement du sang est un vieux problème que l’on peut faire remonter à Euler en 1775 et aux premiers travaux sur l’écoulement des fluides. Cependant, l’analyse du comportement des biofluides - tels que le sang dans nos vaisseaux sanguins - présente des caractéristiques propres. En effet, la particularité de ces fluides biologiques est qu’ils sont vivants ! Ils ne font pas que s’écouler, mais sont aussi en interaction avec leur milieu ; ils transportent des nutriments, de l’oxygène, ils ont une fonction biologique qui complique considérablement leur comportement.
La complexité des systèmes étudiés est telle que des hypothèses simplificatrices s’avèrent nécessaires. On suppose que le sang se comporte dans les grands vaisseaux comme l’eau, qui le compose principalement et on utilise donc les équations de la dynamique des fluides incompressibles dans un domaine, les équations de Navier-Stokes complétées par des conditions sur le bord du domaine. Par ailleurs, on fait abstraction des interactions fluide-structure, hypothèse notamment valide au niveau veineux. En effet, dans le cerveau, les vaisseaux sont enchâssés dans des structures méningées, et donc peu mobiles. Néanmoins, ce modèle n’est adéquat que dans la région intracrânienne, car au delà, les veines jugulaires, par exemple, se déforment en fonction de la vitesse du sang qui s’y écoule.
Dans l’article [1], les auteurs modélisent l’écoulement du sang dans le réseau veineux cérébral. Puis, ce modèle est appliqué à un réseau veineux cérébral réaliste - c’est-à-dire un maillage de calcul - obtenu à partir d’images IRM acquises sur des sujets volontaires (cf. Figure 1).

Un tel maillage de calcul est préalablement conçu grâce à des algorithmes de segmentation d’images spécifiquement adaptés aux réseaux tubulaires [2]. Ces algorithmes ont été mis au point, dans le cadre de ce projet, par Olivia Miraucourt et Odyssée Merveille, toutes deux lauréates de prix de thèse pour leurs travaux [3,4].

L’étude de la validité de ces simulations numériques des flux sanguins nécessite leur observation in vivo. L’unique moyen pour ce faire est d’avoir recours à des séquences spécifiques, notamment en imagerie par résonance magnétique (IRM). Il est alors envisageable de "comparer" des images réelles acquises en IRM avec les simulations. Mais, il faut alors pouvoir interpréter ces simulations de flux sanguins sous une forme équivalente, à savoir des données IRM simulées.
L’IRM permet d’observer les atomes d’hydrogène des molécules d’eau, via leurs propriétés magnétiques. En particulier, il est possible de quantifier leur mouvement par l’observation du déphasage de leur moment magnétique, proportionnel à leur vitesse. Les équations de Bloch, qui formalisent le mécanisme IRM, nous permettent alors de modéliser le lien phase-vitesse. La thèse d’Alexandre Fortin [5] a justement porté sur le développement d’une telle approche permettant de générer des images IRM à partir des simulations de flux sanguins.
Toutes ces méthodes ont été implantées sous forme de logiciels libres [6]. Ces outils permettent alors de mener des expérimentations visant à confronter les résultats de simulation obtenus avec des données réelles (fantômes physiques, données cliniques…).
Ces travaux permettent de progresser dans la compréhension du réseau vasculaire, dont les mécanismes sont encore largement méconnus à ce jour. Ils aident également à mieux corréler ce que l’on observe par le filtre de l’imagerie et les phénomènes qui se produisent réellement au sein des vaisseaux. Ils ouvrent de nombreuses perspectives, par exemple en termes d’enseignement de la médecine par des outils numériques, mais également pour la création d’outils de recherche reproductible pour l’analyse d’images.

Pour en savoir plus sur le projet VIVABRAIN, ANR-12-MONU-0010

Références :
[1] O. Miraucourt, S. Salmon, M. Szopos et M. Thiriet. Blood flow in the cerebral venous system : Modeling and simulation. Computer Methods in Biomechanics and Biomedical Engineering, Vol 20, Issue 5, 2017, pp. 471 - 482.

[2] O. Merveille, O. Miraucourt, S. Salmon, N. Passat, H. Talbot. A variational model for thin structure segmentation based on a directional regularization. International Conference on Image Processing, pp. 4324 - 4328, 2016.

[3] O. Merveille. A morphological framework for curvilinear structure analysis. Application to the filtering and segmentation of blood vessels. Université Paris-Est, 2016. Prix de thèse AFRIF 2016.

[4] O. Miraucourt. Génération de modèles vasculaires cérébraux : segmentation de vaisseaux et simulation d’écoulements sanguins. Université de Reims Champagne-Ardenne, 2016. Prix de thèse "Numérique’" 2017 de l’Université de Champagne.
[5] A. Fortin. Simulation d’expériences

d’angiographie cérébrale par résonance magnétique. Université de Reims Champagne-Ardenne, 2017. Lauréat de la finale régionale Champagne-Ardenne de MT180.

[6] N. Passat, S. Salmon, J. - P. Armspach, B. Naegel, C. Prud’homme, H. Talbot, A. Fortin, S. Garnotel, O. Merveille, O. Miraucourt, R. Tarabay, V. Chabannes, A. Dufour, A. Jezierska, O. Balédent, E. Durand, L. Najman, M. Szopos, A. Ancel, J. Baruthio, M. Delbany, S. Fall, G. Pagé, O. Génevaux, M. Ismail, P. Loureiro de Sousa, M. Thiriet, J. Jomier.From real MRA to virtual MRA : Towards an open-source framework, MICCAI, pp. 335 - 343, 2016.

Contact
: Stéphanie Salmon | Laboratoire de Mathématiques de Reims (EA 4535) & Fédération Arc-Mathématiques | CNRS & Université Reims-Champagne Ardenne.

 

   DOCUMENT         CNRS         LIEN

 
 
 
 

LE NOMBRE D'OR

 

 

 

 

 

 

 

Le nombre d'or
 

L'Homme de Vitruve de Léonard de Vinci            LIEN

Un nombre étonnant, mystérieux et magique pour avoir fait parler de lui depuis la plus haute antiquité dans de nombreux domaines tels que la géométrie, l’architecture, la peinture, la nature, …
Il serait une expression d’harmonie et d’esthétique dans les arts bien que certains lui reproche son caractère ésotérique qui cherche absolument à lui trouver une obscure beauté et qui semble y parvenir !
On le note φ (phi) en hommage au sculpteur grec Phidias (Ve siècle avant J.C.) qui participa à la décoration du Parthénon sur l’Acropole à Athènes.
Quant à son nom, il a évolué avec le temps. Le mathématicien et moine franciscain Luca Pacioli (1445 ; 1517) parle de « Divine proportion », plus tard le physicien Johannes Kepler (1571 ; 1630) le désigne comme le « joyau de la géométrie ». Alors que pour Léonard de Vinci, ce sera la « section dorée ». Il faudra attendre 1932, avec le prince Matila Ghyka, diplomate et ingénieur pour entendre le terme de « nombre d’or ».
On retrouve des traces du nombre d’or bien avant les grecs. En Egypte par exemple, coïncidence ou volonté d'y parvenir, le rapport de l'apothème (hauteur d'une face latérale) de la pyramide de Khéops (mesurée par Thalès de Milet (-624 ; -548)) par sa demi-base est égal au nombre d'or.
Mais c’est le grec Euclide d'Alexandrie (-320? ; -260?) qui pour la première fois en donne une définition dans son œuvre « Les éléments ».

 est sa valeur exacte. Son écriture décimale est infinie.
Donnons une valeur approchée :
1,618 033 988 749 894 848 204 586 834 365 638 117 720 309 179 805 762 862 135 448 622 705 260 462 818 902 449 707 207 204.
Vous pouvez télécharger les 5000 premières décimales du nombre d’or en cliquant sur le lien suivant : 5000 décimales.
 
Le rectangle d'or


Le format d'un rectangle est le rapport longueur sur largeur.
Exemple : Le format d'une feuille de papier classique (A3, A4 ou A5) est

.
Lien externe vers une animation.
Un rectangle d’or est un rectangle dont le format est égal au nombre d’or.
Lien externe vers une animation.
Hasard ou volonté ésotérique, on retrouve le rectangle d’or sur la façade du Parthénon à Athènes.
Sur la photo : DC/DE = φ.


En effet, le nombre d'or correspond bien à un rapport de longueurs. On partage un segment de façon que le rapport de la grande part sur la petite part soit égal à celui du tout sur la grande part. Ce rapport est le nombre d'or que l'on retrouve dans les côtés du rectangle d'or.
Ainsi, pour construire un segment de longueur le nombre d'or, on commence par tracer un triangle ABC rectangle en A dont les côtés de l'angle droit mesurent 1 et 1/2. Puis on reporte la longueur de l'hypoténuse sur la demi droite [AC) (voir figure ci-dessous). On démontre facilement à l'aide du théorème de Pythagore que l'hypoténuse BC mesure √5/2 et donc la longueur AD du rectangle ABED est égale au nombre d'or. Ce rectangle est un rectangle d'or.

 
La spirale d'or       LIEN
Pour construire une spirale d’or, on construit un rectangle d’or dans lequel on construit un grand carré de côté la largeur du rectangle. On réitère l’opération dans le rectangle restant qui est un rectangle d’or … et ainsi de suite, … Puis, on construit des quarts de cercle dans les carrés.
Lien externe vers une animation.

Cliquer pour voir la spirale animée
    

Cliquer pour voir les flamands roses de Fibonacci
Merci à shapiro500.com pour son autorisation de partage
La spirale obtenue se rencontre souvent dans la nature : tournesols, pommes de pins, coquillages, disposition des feuilles ou des pétales sur certaines plantes.


    

    

 
Le triangle d'or
On appelle triangle d'or un triangle isocèle dont les côtés sont dans le rapport du nombre d'or. De ce fait, les deux triangles d'or possible ont des angles à la base de 36° ou 72°.



La suite de Fibonacci


Citons le célèbre problème de prolifération des lapins dû au mathématicien italien Léonard de Pise dit Fibonacci (1175 - 1240) :
"Combien de couples de lapins obtiendrons-nous à la fin de chaque mois si commençant avec un couple, chaque couple produit chaque mois un nouveau couple, lequel devient productif au second mois de son existence ?"
Au premier mois, il y aura 1 couple. Au deuxième, il y aura 1 couple. Au troisième mois, il y aura 2 couples. Et ainsi de suite pour obtenir la suite de Fibonacci : 1 ; 1 ; 2 ; 3 ; 5 ; 8 ; 13 ; 21 ; 34 ; 55 ; 89 ; 144 ; 233 ; 377 ;.... dont chaque terme est la somme des deux termes qui le précèdent.
En prenant les rapports de deux nombres successifs de la suite, on constate que ces rapports se rapprochent du nombre d’or plus les nombres sont élevés dans la suite.
 
En algèbre
Le nombre d’or est solution de l’équation x2 - x - 1 = 0.
Prouvons-le à l'aide d'un rectangle d'or de largeur 1. Dans ce cas la longueur est égale au nombre d'or. Notons la x.
Mais nous avons vu plus haut que le rapport de la longueur (x) à la largeur (1) est égal au rapport du tout (x+1) à la longueur (x), soit :
x/1 = (x+1) / x.
En multipliant des deux côtés par x :
x2 = x + 1,
soit : x2 - x - 1 = 0.
 
Etonnant
Chez un humain, le rapport de la hauteur totale à la hauteur du nombril est égal au nombre d’or. Mais il n'y a rien de mathématiques la dessous !!!
Enfin, pour les amateurs de belles formules, citons celle-ci qui met en relation le nombre d’or et le nombre Pi :

DOCUMENT  math-et-tiques.fr  LIEN
 

 
 
 
 

CHAOS, IMPRÉDICTIBILITÉ, HASARD

 

 

 

 

 

 

 

CHAOS, IMPRÉDICTIBILITÉ, HASARD

Le monde qui nous entoure paraît souvent imprévisible, plein de désordre et de hasard. Une partie de cette complexité du monde est maintenant devenue scientifiquement compréhensible grâce à la théorie du chaos déterministe. Cette théorie analyse quantitativement les limites à la prédictibilité d'une l'évolution temporelle déterministe : une faible incertitude initiale donne lieu dans certains cas à une incertitude croissante dans les prévisions, et cette incertitude devient inacceptable après un temps plus ou moins long. On comprend ainsi comment le hasard s'introduit inévitablement dans notre description du monde. L'exemple des prévisions météorologiques est à cet égard le plus frappant. Nous verrons comment les idées à ce sujet évoluent de Sénèque à Poincaré, puis nous discuterons comment le battement d'ailes du papillon de Lorenz peut affecter la météo, donnant lieu à des ouragans dévastateurs des milliers de kilomètres plus loin. Ainsi, la notion de chaos déterministe contribue non seulement à notre appréciation pratique des incertitudes du monde qui nous entoure, mais encore à la conceptualisation philosophique de ce que nous appelons cause et de ce que nous appelons hasard.

Texte de la 218e conférence de l’Université de tous les savoirs donnée le 5 août 2000.
Chaos, imprédictibilité et hasard par David Ruelle

Pour interpréter le monde qui nous entoure nous utilisons un grand nombre de concepts très divers. Certains concepts sont concrets comme vache, puceron, papillon, d’autres abstraits comme espace, temps, hasard, ou causalité. Ces concepts sont des créations humaines : leur histoire est intimement liée à celle du langage, et leur contenu peut varier d’une culture à une autre. Nous pensons que des mots comme espace, temps, hasard, causalité correspondent à des réalités fondamentales, indépendantes de la culture où nous vivons, et même indépendantes de l’existence de l’homme. Mais il faut bien admettre que les concepts abstraits que nous venons d’énumérer ont évolué au cours de l’histoire, et que cette évolution reflète un progrès dans notre compréhension de la nature des choses. Dans ce progrès, la philosophie et la science ont joué un rôle important. Dès l’Antiquité, par exemple, les gens cultivés avaient acquis une certaine idée de l’immensité de l’univers grâce aux travaux des astronomes. Des notions comme « erratique et imprévisible » ou « peu fréquent et improbable » ont sans doute une origine préhistorique ou même antérieure au langage. En effet, une bonne appréciation des risques peut aider à la survie. Ainsi si l’orage menace il est prudent de se mettre à l’abri. En général il faut se méfier des caprices des gens et de la nature, caprices qui expriment la liberté des hommes et des choses de se comporter parfois de manière aléatoire et imprévisible. Si les notions liées au hasard et au libre choix sont d’une grande aide dans la pratique, la notion de cause est aussi une conceptualisation utile : la fumée par exemple a une cause qui est le feu. De même les marées ont une cause qui est la lune : ce n’est pas tout à fait évident, mais la chose était connue des anciens, et cette connaissance pouvait être fort utile. On peut ainsi essayer de tout expliquer comme un enchaînement plus ou moins évident de causes et d’effets. On arrive de cette manière à une vision déterministe de l’univers. Si l’on y réfléchit un peu, le déterminisme, c’est-à-dire l’enchaînement bien ordonné des causes et des effets semble en contradiction avec la notion de hasard. Sénèque qui eut la charge d’éduquer le jeune Néron se penche sur le problème dans le De Providentia et dit ceci : « les phénomènes mêmes qui paraissent le plus confus et le plus irrégulier : je veux dire les pluies, les nuages, les explosions de la foudre, ..., ne se produisent pas capricieusement : ils ont aussi leurs causes. » Cette affirmation porte en germe le déterminisme scientifique, mais, il faut bien voir que son contenu est surtout idéologique. Sénèque était un amateur d’ordre, un ordre imposé par une loi éternelle et divine. Le désordre et le hasard lui répugnaient. Cependant, comme je l’ai dit, les notions liées au hasard sont utiles, pratiquement et conceptuellement, et l’on perd peut-être plus qu’on ne gagne à les évacuer pour des motifs idéologiques. On peut d’ailleurs reprocher de manière générale aux idéologies de vouloir supprimer des idées utiles, et cela s’applique encore aux idéologies modernes, dans leurs ambitions simplificatrices et leur intolérance aux fantaisies individuelles. Mais quittons maintenant le domaine idéologique pour parler de science. Et puisque le feu est la cause de la fumée, allons voir un physico-chimiste spécialiste des phénomènes de combustion. Il nous apprendra des choses fascinantes, et nous convaincra que les problèmes de combustion sont importants, complexes, et encore mal compris. En fait si l’on s’intéresse aux problèmes de causalité et de déterminisme, plutôt que de passer sa vie à étudier les problèmes de combustion, mieux vaut choisir un problème plus simple. Par exemple celui d’une pierre jetée en l’air, surtout s’il n’y a pas d’air. On peut en effet, avec une très bonne précision, décrire par des équations déterministes la trajectoire d’une pierre jetée en l’air. Si l’on connaît les conditions initiales, c’est-à-dire la position et la vitesse de la pierre à l’instant initial, on peut calculer la position et la vitesse à n’importe quel autre instant. Au lieu d’une pierre jetée en l’air nous pouvons considérer le ballet des planètes et autres corps célestes autour du soleil, ou la dynamique d’un fluide soumis à certaines forces. Dans tous ces cas l’évolution temporelle du système considéré, c’est-à-dire son mouvement, satisfait à des équations déterministes. Si l’on veut, on peut dire que les conditions initiales d’un système sont la cause de son évolution ultérieure et la déterminent complètement. Voilà qui devrait satisfaire Lucius Annaeus Seneca. Notons quand même que le concept de cause a été remplacé par celui d’évolution déterministe, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Par exemple, les équations de Newton qui déterminent les mouvements des planètes permettent à partir de conditions initiales données de calculer non seulement les états futurs du système solaire, mais également les états passés. On a oublié que la cause devait précéder l’effet. En fait, l’analyse scientifique du concept de cause montre qu’il s’agit d’une notion complexe et ambiguë. Cette notion nous est très utile pour vivre dans un monde complexe et ambigu, et nous ne voudrions pas nous en passer. Cependant la science préfère utiliser des concepts plus simples et moins ambigus, comme celui d’équation d'évolution déterministe. Notons d’ailleurs que l’idée de hasard semble incompatible avec la notion d’évolution déterministe tout autant qu’avec un enchaînement bien ordonné de causes et d’effets. Nous allons dans un moment revenir à ce problème. Mais avant cela je voudrais discuter une précaution verbale que j’ai prise en parlant d’équations d’évolution déterministe valables avec une très bonne précision. Si vous demandez à un physicien des équations d’évolution pour tel ou tel phénomène, il vous demandera avec quelle précision vous les voulez. Dans l’exemple de la dynamique du système solaire, suivant la précision requise, on tiendra compte ou non du ralentissement de la rotation de la terre par effet de marée, ou du déplacement du périhélie de Mercure dû à la relativité générale. Il faudra d’ailleurs bien s’arrêter quelque part : on ne peut pas tenir compte, vous en conviendrez, des déplacements de chaque vache dans sa prairie, ou de chaque puceron sur son rosier. Même si, en principe, les déplacements de la vache et du puceron perturbent quelque peu la rotation de la terre. En Bref, la physique répond aux questions qu’on lui pose avec une précision qui peut être remarquable, mais pas absolument parfaite. Et cela n’est pas sans conséquences philosophiques, comme nous le verrons plus loin. J’ai parlé des équations d’évolution déterministes qui régissent les mouvements des astres ou ceux des fluides, de l’atmosphère ou des océans par exemple. Ces équations sont dites classiques car elles ne tiennent pas compte de la mécanique quantique. En fait la mécanique quantique est une théorie plus exacte que la mécanique classique, mais plus difficile à manier, et comme les effets quantiques semblent négligeables pour les mouvements des astres, de l’atmosphère ou des océans, on utilisera dans ces cas des équations classiques. Cependant, la mécanique quantique utilise des concepts irréductibles à ceux de la mécanique classique. En particulier la mécanique quantique, contrairement à la mécanique classique, fait nécessairement référence au hasard. Dans une discussion des rapports entre hasard et déterminisme, ne faudrait-il pas par conséquent utiliser la mécanique quantique plutôt que classique ? La situation est la suivante : la physique nous propose diverses théories plus pou moins précises et dont les domaines d’application sont différents. Pour une classe donnée de phénomènes plusieurs théories sont en principe applicables, et on peut choisir celle que l’on veut : pour toute question raisonnable la réponse devrait être la même. En pratique on utilisera la théorie la plus facile à appliquer. Dans les cas qui nous intéressent, dynamique de l’atmosphère ou mouvement des planètes, il est naturel d’utiliser une théorie classique. Après quoi il sera toujours temps de vérifier que les effets quantiques ou relativistes que l’on a négligés étaient réellement négligeables. Et que somme toute les questions que l’on s’est posées étaient des questions raisonnables. Les progrès de la physique ont montré que les équations d’évolution déterministes étaient vérifiées avec une précision souvent excellente, et parfois stupéfiante. Ces équations sont notre reformulation de l’idée d’enchaînement bien ordonné de causes et d’effets. Il nous faut maintenant parler de hasard, et essayer de reformuler ce concept en termes qui permettent l’application des méthodes scientifiques. On dit qu’un événement relève du hasard s’il peut, pour autant que nous sachions, soit se produire soit ne pas se produire, et nous avons tendance à concevoir notre incertitude à ce sujet comme ontologique et fondamentale. Mais en fait l’utilité essentielle des concepts du hasard est de décrire une connaissance entachée d’incertitude, quelles que soient les origines de la connaissance et de l’incertitude. Si je dis qu’à cette heure-ci Jean Durand a une chance sur deux d’être chez lui, je fournis une information utile : cela vaut la peine d’essayer de téléphoner à son appartement. La probabilité un demi que j’attribue au fait que Jean Durand soit chez lui reflète ma connaissance de ses habitudes, mais n’a pas de caractère fondamental. En particulier, Jean Durand lui-même sait très bien s’il est chez lui ou pas. Il n’y a donc pas de paradoxe à ce que des probabilités différentes soient attribuées au même événement par différentes personnes, ou par la même personne à des moments différents. Le hasard correspond à une information incomplète, et peut avoir des origines diverses. Il y a un siècle environ, Henri Poincaré a fait une liste de sources possibles de hasard. Il mentionne par exemple qu’au casino, c’est le manque de contrôle musculaire de la personne qui met en mouvement la roulette qui justifie le caractère aléatoire de la position où elle s’arrête. Pour des raisons historiques évidentes, Poincaré ne mentionne pas la mécanique quantique comme source de hasard, mais il discute une source d’incertitude qui a été analysée en grand détail beaucoup plus tard sous le nom de chaos et que nous allons maintenant examiner. Prenons un système physique dont l’évolution temporelle est décrite par des équations déterministes. Si l’on connaît l’état du système à un instant initial, d’ailleurs arbitraire, on peut calculer son état à tout autre instant. Il n’y a aucune incertitude, aucun hasard. Mais nous avons supposé implicitement que nous connaissions l’état initial avec une totale précision. En fait, nous ne pouvons mesurer l’état initial qu’avec une précision limitée (et d’ailleurs les équations déterministes que nous utilisons ne représentent qu’approximativement l’évolution réelle du système physique qui nous occupe). Il faut donc voir comment une petite imprécision dans notre connaissance de l’état initial au temps 0 (zéro) va affecter nos prédictions sur un état ultérieur, au temps t. On s’attend à ce qu’une incertitude suffisamment petite au temps 0 donne lieu à une incertitude petite au temps t. Mais la question cruciale est de savoir comment cette incertitude va dépendre du temps t. Il se trouve que pour beaucoup de systèmes, dits chaotiques, l’incertitude (ou erreur probable) va croître rapidement, en fait exponentiellement avec le temps t. Cela veut dire que si l’on peut choisir un laps de temps T au bout duquel l’erreur est multipliée par 2, au temps 2T elle sera multipliée par 4, au temps 3T par 8, et ainsi de suite. Au temps 10T le facteur est 1024, au temps 20T plus d’un million, au temps 30T plus d’un milliard ... et tôt ou tard l’incertitude de notre prédiction cesse d’être petit pour devenir inacceptable. Le phénomène de croissance rapide des erreurs de prédiction d’un système physique, que l’on appelle chaos , introduit donc du hasard dans la description d’un système physique, même si ce système correspond à des équations d’évolution parfaitement déterministes comme celles de la dynamique des fluides ou du mouvement des astres. Voici ce que dit Henri Poincaré dans le chapitre sur le hasard de son livre Science et Méthode publiée en 1908 : « Une cause très petite, qui nous échappe, détermine un effet considérable que nous ne pouvons pas ne pas voir, et alors nous disons que cet effet est dû au hasard. » Cette affirmation, Poincaré en donne un exemple emprunté à la météorologie : « Pourquoi Les météorologistes ont-ils tant de peine à prédire le temps avec quelque certitude ? Pourquoi les chutes de pluie, les tempêtes elles-mêmes nous semblent-elles arriver au hasard, de sorte que bien des gens trouvent tout naturel de prier pour avoir de la pluie ou du beau temps, alors qu’ils jugeraient ridicule de demander une éclipse par une prière ? Nous voyons que les grandes perturbations se produisent généralement dans les régions où l’atmosphère est en équilibre instable. Les météorologistes voient bien que cet équilibre est instable, qu’un cyclone va naître quelque part ; mais où, ils sont hors d’état de la dire ; un dixième de degré en plus ou en moins en un point quelconque, le cyclone éclate ici et non pas là, et il étend ses ravages sur des contrées qu’il aurait épargnées. Si on avait connu ce dixième de degré, on aurait pu le savoir d’avance, mais les observations n’étaient ni assez serrées ni assez précises, et c’est pour cela que tout semple dû à l’intervention du hasard. » Les affirmations de Poincaré sur la météorologie dépassent, il faut bien le dire, ce que la science du début du 20-ième siècle permettait d’établie scientifiquement. Les intuitions géniales de Poincaré ont été confirmées, mais on trouverait sans peine des intuitions d’autres savants qui se sont révélées fausses. Il est donc heureux que, après avoir été oubliées, les idées de Poincaré aient été redécouvertes, étendues, et soumises à une analyse scientifique rigoureuse. Cette nouvelle période commence avec un article de Lorenz relatif à la météorologie en 1963, un article de Takens et moi-même sur la turbulence en 1971, puis une foule de travaux dans les années 70, 80, 90 qui édifient la théorie moderne du chaos. Le mot chaos lui-même apparaît dans son sens technique en 1975. Il n’est possible de donner ici qu’une vue très sommaire des aspects techniques de la théorie du chaos, mais j’insiste sur le fait que les résultats techniques sont essentiels. Ces résultats permettent de changer l’affirmation du sens commun suivant laquelle « de petites causes peuvent avoir de grands effets » en affirmations quantitatives comme celle concernant l’effet papillon dont nous parlerons dans un moment. La théorie du chaos étudie donc en détail comment une petite incertitude sur l’état initial d’une évolution temporelle déterministe peut donner lieu à une incertitude des prédictions qui croît rapidement avec le temps. On dit qu’il y a dépendance sensitive des conditions initiales. Cela veut dire que de petites causes peuvent avoir de grands effets, non seulement dans des situations exceptionnelles, mais pour toutes les conditions initiales. En résumé, le terme chaos désigne une situation où, pour n’importe quelle condition initiale, l’incertitude des prédictions croît rapidement avec le temps. Pour donner un exemple, considérons un faisceau de rayons lumineux parallèles tombant sur un miroir convexe. Après réflexion, nous avons un faisceau divergent de rayons lumineux. Si le faisceau initial était divergent, il serait encore plus divergent après réflexion. Si au lieu de rayons lumineux et de miroir nous avons une bille de billard qui rebondit élastiquement sur un obstacle convexe, la situation géométrique est la même, et on conclut qu’une petite incertitude sur la trajectoire de la bille avant le choc donne lieu à une incertitude plus grande après le choc. S’il y a plusieurs obstacles convexes que la bille heurte de façon répétée, l’incertitude croît exponentiellement, et on a une évolution temporelle chaotique. Cet exemple était connu de Poincaré, mais ce n’est que bien plus tard qu’il a été analysé de manière mathématiquement rigoureuse par Sinaï. Comme l’étude mathématique des systèmes chaotiques est d’une grande difficulté, l’étude du chaos combine en fait trois techniques : les mathématiques, les simulations sur ordinateur, et l’expérimentation (au laboratoire) ou l’observation (de l’atmosphère, des astres). Notons que les simulations sur ordinateur n’existaient pas du temps de Poincaré. Ces simulations ont joué un rôle essentiel en montrant que les systèmes déterministes tant soit peu complexes présentent fréquemment de la sensitivité aux conditions initiales. Le chaos est donc un phénomène très répandu. La météorologie fournit une application exemplaire des idées du chaos. En effet, on a de bons modèles qui décrivent la dynamique de l’atmosphère terrestre. L’étude par ordinateur de ces modèles montre qu’ils sont chaotiques. Si l’on change un peu les conditions initiales, les prédictions après quelques jours deviennent assez différentes : on a atteint la limite de la fiabilité du modèle. Bien entendu les prédictions faites avec ces modèles décollent après quelques jours de la réalité observée, et l’on comprend maintenant pourquoi : le chaos limite la prédictibilité du temps qu’il va faire. Le météorologiste Ed Lorenz, que nous avons déjà mentionné, a rendu populaire le concept de sensitivité aux conditions initiales sous le nom d’effet papillon. Dans un article grand public, il explique comment le battement des ailes d’un papillon, après quelques mois, a un tel effet sur l’atmosphère de la terre entière qu’il peut donner lieu à une tempête dévastatrice dans une contrée éloignée. Cela rappelle ce qu’écrivait Poincaré, mais paraît tellement extrême qu’on peut se demander s’il faut accorder à l’effet papillon plus qu’une valeur métaphorique. En fait, il semble bien que l’affirmation de Lorenz doit être prise au pied de la lettre. On va considérer la situation où le papillon bat des ailes comme une petite perturbation de la situation où il se tiendrait tranquille. On peut évaluer l’effet de cette petite perturbation en utilisant le caractère chaotique de la dynamique de l’atmosphère. (Rappelons que les modèles de l’atmosphère terrestre montrent une dynamique chaotique aux grandes échelles ; aux petites échelles, on a aussi du chaos à cause de la turbulence généralisée de l’air où nous baignons). La perturbation causée par le papillon va donc croître exponentiellement, c’est-à-dire très vite, et l’on peut se convaincre qu’au bout de quelques mois l’état de l’atmosphère terrestre aura changé du tout au tout. De sorte que des lieux éloignés de celui où se trouvait le papillon seront ravagés par la tempête. La prudence m’incite à prendre ici quelques précautions verbales. Il s’agit d’éviter qu’un doute sur un point de détail ne jette le discrédit sur des conclusions par ailleurs bien assurées. On peut se demander comment des perturbations aux petites dimensions (comme la dimension d’un papillon) vont se propager aux grandes dimensions (comme celle d’un ouragan). Si la propagation se fait mal ou très mal, peut-être faudra-t-il plus que quelques mois pour qu’un battement d’ailes de papillon détermine un ouragan ici ou là. Cela rendrait l’effet papillon moins intéressant. A vrai dire, la turbulence développée reste mal comprise et la conclusion de Lorenz reste donc un peu incertaine. L’image du papillon est jolie cependant, il serait dommage qu’on doive l’enterrer et, jusqu’à plus ample informé, j’y reste personnellement attaché. Quoi qu’il en soit, la circulation générale de l’atmosphère n’est pas prédictible plusieurs mois à l’avance. C’est un fait bien établi. Un ouragan peut donc se déclencher ici ou là de manière imprévue, mais cela dépendra peut-être d’incertitudes autres que les battements d’ailes d’un papillon. Si l’on y réfléchit un instant, on voit que le déclenchement d’une tempête à tel endroit et tel moment résulte d’innombrables facteurs agissant quelques mois plus tôt. Que ce soient des papillons qui battent des ailes, des chiens qui agitent la queue, des gens qui éternuent, ou tout ce qui vous plaira. La notion de cause s’est ici à ce point diluée qu’elle a perdu toute signification. Nous avons en fait perdu tout contrôle sur l’ensemble des « causes » qui, a un instant donné, concourent à ce qu’une tempête ait lieu ou n’ait pas lieu ici ou là quelques mois plus tard. Mêmes des perturbations infimes dues à la mécanique quantique, à la relativité générale, ou à l’effet gravitationnel d’un électron à la limite de l’univers observable, pourraient avoir des résultats importants au bout de quelques mois. Aurions-nous dû en tenir compte ? Il est clair qu’on n’aurait pas pu le faire. L’effet de ces perturbations infimes peut devenir important après quelques mois, mais un mur d’imprédicibilité nous interdit de le voir. Pour l’atmosphère terrestre, ce mur d’imprédicibilité est situé à quelques jours ou semaines de nous dans le futur. Je voudrais revenir brièvement à mon implication personnelle dans l’histoire du chaos. A la fin des années 60, je m’étais mis à l’étude de l’hydrodynamique, qui est la science de l’écoulement des fluides. Certains des écoulements que l’on observe sont tranquilles et réguliers, on les dit laminaires, d’autres sont agités et irréguliers, on les dit turbulents. Les explications de la turbulence que j’avais trouvées, en particulier dans un livre de Landau et Lifschitz sur l’hydrodynamique, ne me satisfaisaient pas, car elles ne tenaient pas compte d’un phénomène mathématique nouveau, dont j’avais appris l’existence dans les travaux de Smale. Quel est ce phénomène ? C’est l’abondance d’évolutions temporelles de nature étrange, avec dépendance sensitive des conditions initiales. Je m’étais alors convaincu que la turbulence devait être liée à une dynamique « étrange ». Dans un article joint avec Takens nous avons proposé que la turbulence hydrodynamique devait être représentée par des attracteurs étranges, ou chaotiques, et étudié le début de la turbulence, ou turbulence faible. Par la suite, de nombreux travaux expérimentaux ont justifié cette analyse. Cela ne résout pas le problème de la turbulence, qui reste l’un des plus difficiles de la physique théorique, mais on sait au moins que les théories « non chaotiques » jadis à l’honneur ne peuvent mener à rien. Quand le chaos est devenu à la mode, il a donné lieu à d’innombrables travaux. Certains de ces travaux développaient les aspects techniques de la théorie du chaos, et il n’est pas question d’en parler ici, d’autres analysaient diverses classes de phénomènes naturels dans l’espoir d’y trouver un comportement chaotique. C’est ainsi que j’ai proposé qu’il devait y avoir des oscillations chimiques chaotiques, ce qui effectivement a été démontré par l'expérience dans la suite. Ce fut une période féconde où, en réfléchissant un peu, on pouvait faire des découvertes d’un intérêt durable. Toutes les idées n’ont d’ailleurs pas été également bonnes. Ainsi, des essais d’application du chaos à l’économie et à la finance se sont révélés moins convaincants ; j’y reviendrai. Mais quand Wisdom et Laskar ont cherché du chaos dans la dynamique du système solaire, ils ont eu la main remarquablement heureuse. Le mouvement des astres du système solaire semble extraordinairement régulier, puisque l’on peut par le calcul prédire les éclipses, ou retrouver celles qui ont eu lieu, il y a plus de mille ans. On a donc longtemps pensé que le mouvement des planètes, et en particulier de la Terre, était exempt de chaos. On sait maintenant que c’est faux. L’orbite de la Terre est une ellipse dont les paramètres varient lentement au cours du temps, en particulier l’excentricité, c’est-à-dire l’aplatissement. En fait on a maintenant montré que la variation temporelle de l’excentricité est chaotique. Il y a donc de l’imprédicibilité dans le mouvement de la Terre. Le temps nécessaire pour que les erreurs de prédiction doublent est de l’ordre de 5 millions d’années. C’est un temps fort long par rapport à la vie humaine, mais assez court à l’échelle géologique. Le chaos que l’on a trouvé dans le système solaire n’est donc pas sans importance, et les travaux dans ce domaine se poursuivent activement, mais ce n’est pas ici le lieu d’en discuter. Les résultats accumulés depuis plusieurs décennies nous ont donné une assez bonne compréhension du rôle du chaos en météorologie, en turbulence hydrodynamique faible, dans la dynamique du système solaire, et pour quelques autres systèmes relativement simples. Qu’en est-il de la biologie, de l’économie, de la finance, ou des sciences sociales ? Il faut comprendre que les modélisations utiles dans le domaine du vivant sont assez différentes de celles qui nous satisfont pour des systèmes physiques simples. Les relations du hasard et la nécessité sont d’une autre nature. En fait le domaine du vivant est caractérisé par l’homéostasie qui maintient les organismes dans des conditions appropriées à la vie. L’homéostasie tend par exemple à maintenir la température de notre corps dans d’étroites limites. Elle supprime les fluctuations thermiques et est donc de nature antichaotique. La correction des fluctuations apparaît aussi au niveau du comportement individuel : un projet de voyage est maintenu même si une panne de voiture ou une grève fortuites obligent à changer de moyen de transport. Il s’agit ici de processus correctifs compliqués et qu’il est difficile de représenter par des modèles dynamiques simples auxquels on pourrait appliquer les techniques de la théorie du chaos. Clairement, de petites causes peuvent avoir de grands effets dans la vie de tous les jours, mais aux mécanismes causateurs de chaos s’ajoutent des mécanismes correcteurs, et il est difficile de débrouiller la dynamique qui en résulte. Dans le domaine de l’économie, de la finance ou de l’histoire, on voit aussi que des causes minimes peuvent avoir des effets importants. Par exemple une fluctuation météorologique peut causer la sécheresse dans une région et livrer sa population à la famine. Mais des mécanismes régulateurs effaceront peut-être l’effet de la famine, et l’histoire poursuivra son cours majestueux. Peut-être, mais ce n’est pas certain. Une guerre obscure en Afghanistan a précipité la chute du colossal empire Soviétique. Cette guerre obscure a concouru avec de nombreuses autres causes obscures à miner un empire devenu plus instable qu’on ne le pensait. En fait nous vivons tous dans un monde globalement instable : la rapidité des transports, la transmission presque instantanée de l’information, la mondialisation de l’économie, tout cela améliore peut-être le fonctionnement de la société humaine, mais rend aussi cette société plus instable, et cela à l’échelle de la planète. Une maladie virale nouvelle, ou un virus informatique, ou une crise financière font sentir leurs effets partout et immédiatement. Aujourd’hui comme hier le futur individuel de chaque homme et chaque femme reste incertain. Mais jamais sans doute jusqu’à présent l’imprédictibilité du futur n’a affecté aussi globalement notre civilisation tout entière.

 

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