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Quand la sérotonine tombe sur un os

 

 

 

 

 

 

 

Quand la sérotonine tombe sur un os
01 février 2012
CP de Vernejoul, 1er février 2012 (83,9 ko) 

La sérotonine, un neurotransmetteur cérébral bien connu, est produite localement dans un site inattendu : le tissu osseux. C’est ce que viennent de montrer les chercheurs de l’Unité mixte de recherche 606 "Os et Articulation" (Inserm/Université Paris Diderot) associés au laboratoire de biochimie de l’hôpital Lariboisière et au laboratoire "Cytokines, hématopoïèse et réponse immune" (CNRS/Université Paris Descartes)à l’hôpital Necker à Paris. Cette sérotonine locale favoriserait la dégradation du tissu osseux. Ces résultats publiés cette semaine dans les PNAS suggèrent que des médicaments modulant les effets de la sérotonine, comme les antidépresseurs ou les antimigraineux, pourraient modifier dans un sens ou dans l’autre l’équilibre délicat entre formation et dégradation des os dans l’organisme.

La sérotonine régule une vaste gamme de fonctions comme l'humeur, le comportement, le sommeil, la tension et la thermorégulation. Elle a également des fonctions importantes dans plusieurs tissus périphériques et assure la régulation des fonctions vasculaires, du cœur et dans la mobilité gastro-intestinale. Toutefois, la sérotonine circule dans l’organisme à des taux extrêmement faibles. Elle est majoritairement stockée dans les plaquettes et n’est disponible pour les organes périphériques que si elle est relarguée lors de l’activation de ces plaquettes.
Certains chercheurs se sont intéressés au rôle de la sérotonine sur le tissu osseux qui a récemment fait débat. Alors que certains chercheurs ont décrit une action négative de la sérotonine circulante sur le tissu osseux (elle empêcherait la régénération osseuse en agissant sur les ostéoclastes pour diminuer leur prolifération), d’autres ne retrouvent pas de modification osseuse en l’absence de sérotonine chez la souris.

Ostéoclaste ou ostéoblaste ?
Le remodelage osseux est un processus fortement intégré. Il est assuré par un équilibre fin entre la formation d’os assurée par les ostéoblastes et leur dégradation par les ostéoclastes. Ce renouvellement permanent assure une croissance harmonieuse, le maintien et la réparation des os tout au long de la vie.
Si cet équilibre est rompu, une trop forte activité des ostéoclastes aboutit à une augmentation marquée de la densité osseuse. Au contraire, une résorption osseuse accrue est associée à la perte osseuse et déclenche des maladies comme l'ostéoporose, l'arthrite et des lésions osseuses métastatiques.
Une bonne communication moléculaire entre ostéoblastes et ostéoclastes est donc nécessaire pour réguler l'engagement, la prolifération et la différenciation de précurseurs cellulaires osseux.

© Inserm, J.-P. Roux
Zone de croissance et de résorption de l'os. Les ostéoclastes, cellules qui résorbent l'os, sont colorés en rouge
Face à ces résultats contradictoires, Marie Christine De Vernejoul et ses collègues ont souhaité aller plus loin. Grâce à leurs travaux menés chez la souris, ils ont découvert que cet effet sur le tissu osseux n’était pas dû à la sérotonine "circulante" mais à une production de sérotonine nouvelle. "Nos travaux montrent que la sérotonine est produite localement dans un site inattendu : le tissu osseux. Elle est synthétisée par les ostéoclastes, ces cellules osseuses en charge de résorber l’os." explique la chercheuse Inserm Marie-Christine De Vernejoul.

Une fois synthétisée, la sérotonine agit directement sur les cellules qui la produisent, les ostéoclastes, en augmentant leur différenciation. Cette production de sérotonine locale fait partie d’un processus normal et contribue elle aussi à maintenir l’équilibre entre dégradation et formation osseuse.
"Cette sérotonine locale produite par les ostéoclastes est bien plus importante pour le tissu osseux que la sérotonine circulante, ce qui expliquerait les conclusions différentes observées jusqu’à présent par les scientifiques qui avaient étudié des modèles trop particuliers" ajoutent les auteurs.
D’un point de vue fonctionnel, les chercheurs ont découvert que les ostéoclastes expriment à leur surface le transporteur de la sérotonine et certains récepteurs à la sérotonine. Les drogues affectant le transporteur de la sérotonine, comme les antidépresseurs, et les récepteurs de la sérotonine, comme les antimigraineux, pourraient donc modifier la dégradation du tissu osseux et avoir des conséquences sur cet équilibre précieux entre dégradation et formation d’os.
A ce stade, les perspectives des chercheurs sont nombreuses. Ils vont maintenant étudier si la production de sérotonine par les ostéoclastes est augmentée par la carence en œstrogènes. Dans ce cas, cela pourrait signifier que la sérotonine joue rôle dans l’ostéoporose de la femme ménopausée.


En savoir plus
Sources
"Decreased osteoclastogenesis in 2 serotonin-deficient mice"
Yasmine Chabbi Achenglia,b, Amélie E. Couderta,b, Jacques Callebert c, Valérie Geoffroya,b, Francine Côté d, Corinne Colleta,b,c,1, and Marie-Christine de Vernejoul a,b,1,2
a Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale U606, Hôpital Lariboisière, Paris, France;
b Unité Mixte de Recherche (UMR) 606, Université Paris Diderot, Paris, France;
c Service de Biochimie, Hôpital Lariboisière, Paris, France; and
d Centre National de la Recherche Scientifique UMR 8147, Hôpital Necker–Enfants Malades, Paris, France
PNAS, janvier 2012

Contact chercheur
Marie Christine de Vernejoul / Corinne Collet
Unité Inserm 606 "Os et Articulation"
Tél. : 01 49 95 63 58/ 64 35
Contact presse
presse@inserm.fr

 

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Cancer du col de l'utérus : première résolution 3D d'une oncoprotéine du virus à papillome humain

 


 

 

 

 

 

Paris, 8 février 2013
Cancer du col de l'utérus : première résolution 3D d'une oncoprotéine du virus à papillome humain

Des chercheurs strasbourgeois du laboratoire Biotechnologie et signalisation cellulaire de l'École Supérieure de Biotechnologie de Strasbourg (CNRS/Université de Strasbourg) et de l'Institut de génétique et de biologie moléculaire et cellulaire (CNRS/Université de Strasbourg/Inserm) ont résolu, pour la première fois, la structure tridimensionnelle d'une oncoprotéine majeure, impliquée dans la prolifération cellulaire et à l'origine du développement du papillomavirus humain. Celui-ci, de type 16 (HPV 16), est le plus dangereux de ces virus, responsable des cancers du col de l'utérus. Ces travaux, publiés le 8 février 2013 dans Science, devraient permettre l'identification et l'amélioration de médicaments bloquant les activités tumorigènes de la protéine.
Le cancer du col de l'utérus est l'un des cancers les plus fréquents au monde et le deuxième en termes de mortalité chez la femme. Il est provoqué par les virus à papillome humains (HPV) dits à « haut risque muqueux» (1). Le papillomavirus humain de type 16 (HPV 16) est le plus dangereux. Lorsque le virus HPV infecte une cellule saine, il doit provoquer la multiplication de ces cellules pour se reproduire. Deux de ses protéines, E6 et E7, induisent cette prolifération cellulaire et sont responsables de la prolifération des tumeurs du col de l'utérus, d'où leur nom : "oncoprotéines".

L'équipe de Gilles Travé, chercheur CNRS au laboratoire Biotechnologie et signalisation cellulaire (CNRS/Université de Strasbourg), en étroite collaboration avec les équipes de Jean Cavarelli et de Bruno Kieffer de l'Institut de Génétique et de Biologie Moléculaire et Cellulaire (CNRS/Université de Strasbourg/Inserm) a résolu, pour la première fois, les structures tridimensionnelles des protéines E6 des virus à papillomes humain de type 16 (HPV 16) ainsi que son équivalent bovin de type 1 (BPV1). La structure de E6 de HPV16 avait déjà été résolue en 2012 (2) par ces mêmes chercheurs sous forme libre mais, cette fois, les protéines E6 sont visualisées en train de capturer des protéines cellulaires cibles. La structure d'une protéine E6 entière, attendue depuis près de trente ans, n'avait jamais été résolue auparavant car celle-ci est très difficile à produire dans un laboratoire.

Pour ce faire deux processus ont été nécessaires : d'une part la mise au point de techniques permettant d'isoler la protéine E6 et d'autre part l'utilisation combinée de techniques de résonance magnétique nucléaire (RMN) (3) et de cristallographie (4). Après avoir traité différents problèmes d'agrégation et de purification, les chercheurs ont réussi à produire la protéine E6. Le défi à ce stade était de conserver son repliement (la capacité à s'auto-organiser de la protéine et donc sa fonction biologique). L'acquisition de données de RMN et de cristallographie ont permis d'établir la structure de la protéine E6 à l'aide d'outils informatiques et d'obtenir ainsi sa "photographie" tridimensionnelle à haute résolution.

La structure tridimensionnelle de la protéine E6 capturant sa cible révèle précisément le mécanisme moléculaire de son activité cancérogène et explique aussi l'étonnante capacité de la protéine à détourner, tel un terroriste viral, un grand nombre de fonctions de la cellule infectée. Au niveau thérapeutique, cette avancée est d'une grande importance dans la lutte contre le cancer du col de l'utérus, car elle devrait permettre l'identification et l'amélioration de médicaments bloquant les activités tumorigènes de la protéine.


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Du cœur aux poumons, l’incroyable mécanique des fluides humains

 

 

 

 

 

 

 

Du cœur aux poumons, l’incroyable mécanique des fluides humains

28.09.2015, par Julien Bourdet
Ecoulements biologiques, réseau sanguin Grâce à la mécanique des fluides, discipline qui décrit le comportement des gaz et des liquides, les chercheurs tentent de modéliser le plus fidèlement possible la manière dont les fluides biologiques s’écoulent dans le réseau sanguin et les voies aériennes.

Pour soigner les gênes respiratoires, prédire l’évolution des maladies vasculaires ou encore détecter le paludisme dans le sang, les médecins se tournent aujourd’hui vers les physiciens spécialistes de l’écoulement des fluides.
Observer le mouvement de l’air dans les poumons, voir la poussée du sang gonfler les artères au rythme des battements du cœur. Pour mieux comprendre le fonctionnement global du corps humain, il faut non seulement être capable de représenter les organes qui le composent, mais aussi les fluides qui le parcourent. C’est pourquoi les physiciens viennent aujourd’hui prêter main-forte aux médecins. Grâce à la mécanique des fluides, discipline qui décrit le comportement des gaz et des liquides, ils tentent de modéliser le plus fidèlement possible la manière dont les fluides biologiques s’écoulent dans le réseau sanguin et les voies aériennes. Avec, à la clé, la possibilité d’améliorer les diagnostics médicaux et d’adapter les traitements.

Dépister les risques d’athérosclérose

Considérer les poumons et le système vasculaire comme de simples objets régis par la mécanique des fluides... Voilà une idée qui était loin d'être évidente il y a encore quinze ans. Mais aujourd’hui, de plus en plus de médecins comprennent les bénéfices qu’ils peuvent tirer de cette approche qui commence à faire son entrée dans les hôpitaux. Un exemple révélateur : l’athérosclérose. Cette maladie vasculaire se caractérise par le dépôt d’une plaque composée essentiellement de graisses sur la paroi interne d’une artère. Le diamètre de celle-ci diminue, ce qui peut entraver la circulation sanguine, avec des conséquences parfois dramatiques.

Considérer
les poumons et le
système vasculaire
comme des objets
régis par la
mécanique des
fluides n’était pas
évident il y a
quinze ans.
Grâce aux physiciens, qui font appel à des simulations numériques et à des maquettes du réseau sanguin plus vraies que nature, on sait maintenant que le développement de ce trouble vasculaire est lié en grande partie aux contraintes mécaniques qui s’exercent sur les parois des artères. « En aval d’une bifurcation du réseau sanguin, le flux ralentit, explique Gwennou Coupier, du Laboratoire interdisciplinaire de physique1, à Saint-Martin-d’Hères. Résultat : certaines cellules, les globules blancs en particulier, qui ne sont pas emportées par le courant à cet endroit, parviennent à pénétrer dans la paroi de l’artère, favorisant ainsi la croissance d’une plaque, à l’origine de la maladie. »


Forts de ce constat, les médecins peuvent désormais élaborer un diagnostic précoce pour cette affection pour des sujets dont on sait déjà qu’ils présentent un risque. À partir de la morphologie de leurs vaisseaux reconstituée par IRM, on simule numériquement l’écoulement sanguin dans ce réseau. Et on peut alors pointer du doigt les zones qu’il faut surveiller en priorité.

Guider les chirurgiens dans leurs interventions

Mais ce n’est pas tout : la modélisation peut également guider les chirurgiens dans leurs interventions. « Aujourd’hui, dans le cas de l’athérosclérose, on décide d’opérer un patient selon des critères moyens de taux d’obstruction des artères, précise Gwennou Coupier. En mesurant précisément la contrainte mécanique qui s’exerce sur la paroi de l’artère touchée, on dispose d’un critère plus fin pour prendre la bonne décision. » En fonction des résultats donnés par les modèles, le chirurgien peut ainsi décider d’intervenir ou non. Et, si le choix est fait d’intervenir, les modèles servent à orienter le geste chirurgical. Faut-il dériver le sang en aval de la plaque en effectuant un pontage ? Ou faut-il dilater l’artère à l’aide d’un ballonnet ? Ces deux scénarios peuvent être simulés afin de retenir celui qui rétablira le mieux la circulation sanguine.

Bien d’autres pathologies peuvent être traitées par cette approche biomécanique : les sténoses, ces rétrécissements inhabituels de vaisseaux, ou encore les anévrismes, ces dilatations anormales de la paroi d’une artère qui menacent d’éclater. Objectif des physiciens dans ce dernier cas : évaluer la répartition des pressions et la résistance des parois pour situer le point faible, et tenter de prédire où et quand l’anévrisme va céder. Une fois le diagnostic posé, les calculs permettent là encore de planifier le geste chirurgical. Mais les modélisations de l’écoulement sanguin servent aussi à la conception et à l’optimisation des dispositifs médicaux implantables tels que les stents, les valves ou encore les cathéters. Et permettent une nouvelle fois d’orienter le choix des médecins, qui sauront où les placer exactement chez chaque patient, et quel type utiliser.

Réseau capillaire de l'oeil Réseau des capillaires de l'oeil. Les globules rouges doivent être capables de se déformer pour se frayer un chemin dans ces vaisseaux qui, à certains endroits, sont deux fois plus petits qu’eux.

Dans leur quête d’une description complète des écoulements biologiques, les physiciens ne se focalisent pas seulement sur les plus gros vaisseaux comme les artères et les veines. Ils étudient également le déplacement du sang dans les plus petits capillaires, qui ne mesurent que quelques micromètres de diamètre. « À cette échelle, le fluide ne s’écoule plus de manière homogène, précise Anne-Virginie Salsac, du laboratoire Biomécanique et bioingénierie2, à Compiègne (lire https://lejournal.cnrs.fr/articles/anne-virginie-salsac-et-la-petite-mecanique-du-corps-humainson portrait). Cela est dû au fait que le sang est composé de cellules, et notamment de globules rouges, en suspension. Et, pour se frayer un chemin dans les capillaires, qui à certains endroits sont deux fois plus petits qu’eux, ces derniers doivent se déformer. De leurs déformations dépendront les propriétés de l’écoulement sanguin. »

Diagnostiquer le paludisme

Les scientifiques souhaitent tirer parti de cette observation pour diagnostiquer certaines maladies. À commencer par le paludisme. « Le moustique responsable de cette maladie injecte un parasite qui modifie les propriétés mécaniques des globules rouges, explique Magalie Faivre, de l’Institut des nanotechnologies de Lyon3. Ces derniers qui étaient mous et déformables deviennent rigides. Résultat : ils se bloquent dans les capillaires, avec des conséquences parfois graves. »



D’où l’idée de la chercheuse et de son équipe de développer un dispositif qui utilise la déformabilité des globules rouges pour détecter la présence du paludisme. « Notre dispositif microfluidique est constitué d’un canal de taille micrométrique qui se rétrécit à intervalle régulier, confie-t-elle. On y injecte du sang et on mesure individuellement le déplacement de chaque globule rouge d’un bout à l’autre du canal : capables de se déformer facilement, les globules sains vont vite ; les globules infectés, eux, au contraire, vont beaucoup plus lentement. »

Les chercheurs
ont développé
un dispositif
qui utilise la déformation des
globules rouges
pour détecter
la présence
du paludisme.
Aujourd’hui, l’équipe lyonnaise teste son outil avec du sang dont une partie des globules rouges a été modifiée chimiquement pour imiter les cellules infectées par le parasite. Mais l’année prochaine, les essais commenceront sur des échantillons de sang pathologique. Et d’ici à cinq ans, les chercheurs espèrent pouvoir tester le dispositif, qui à terme fera la taille d’une carte à puce, dans les pays touchés par le paludisme.

Une fois opérationnelle, la technique présentera de nombreux atouts par rapport aux autres méthodes de diagnostic. Premier avantage : on sera quasiment certain de la présence du parasite dans le sang. Ce qui n’est pas le cas actuellement avec une autre technique qui vise à détecter une protéine libérée par le parasite. « On n’est pas à l’abri de faux positifs avec cette méthode biochimique, car la protéine peut persister dans le sang quand bien même tous les parasites ont été éliminés par des médicaments antipaludiques », note Magalie Faivre.

Autre avantage de l’analyse biomécanique : en mettant en évidence deux types de globules rouges – rapides et lents – et en comptant individuellement chacun d’entre eux, il sera possible de mesurer précisément la proportion de cellules infectées. Un paramètre important pour décider du bon traitement à administrer aux malades. Que ne fournit pas actuellement la méthode biochimique.

Prédire les crises de drépanocytose

Autre maladie affectant les globules rouges et qui pourrait bénéficier de l’apport de la mécanique des fluides : la drépanocytose. Cette maladie génétique modifie la structure de l’hémoglobine transportée par les globules rouges. Comme dans le cas du paludisme, ces derniers deviennent plus rigides et obstruent alors les capillaires, ce qui provoque des crises douloureuses extrêmement fortes. La transfusion sanguine est bien souvent le seul remède possible pour soulager les patients. Mais, pour qu’elle soit efficace, il faut qu’elle ait lieu juste avant une crise.

Globule rouge déformé par la drépanocytose Cette micrographie électronique pointe la différence entre des globules rouges normaux et une cellule anormale dite cellule faucille RBC chez une patiente atteinte d’anémie falciforme, la forme la plus grave de drépanocytose.

L’approche mécanique pourrait justement permettre de prédire la survenue de ces crises. « Nous faisons circuler du sang de malades dans des canaux microfluidiques qui reproduisent le réseau capillaire avec ses rétrécissements et ses bifurcations, explique Gwennou Coupier. Le réseau finit par se boucher à certains endroits. Et nous essayons d’expliquer pourquoi. Est-ce à cause de la rigidité des globules rouges ? Est-ce parce qu’ils s’agrègent les uns aux autres ? Est-ce dû à la géométrie du réseau ? » En répondant à ces questions, le chercheur et son équipe espèrent mieux comprendre le phénomène pour pouvoir un jour mieux anticiper l’apparition des crises.

Au-delà du diagnostic, l’étude de l’écoulement sanguin à l’échelle microscopique offre même la perspective de mettre au point de nouvelles techniques thérapeutiques. Ainsi, les chercheurs travaillent actuellement au développement de micro- et de nanocapsules injectables dans le sang pour délivrer des médicaments à des endroits bien précis. De cette façon, on minimiserait la quantité de médicament et on l’apporterait uniquement à la région malade.

« Si on arrive à bien comprendre le devenir des capsules une fois injectées dans la circulation sanguine, on pourra contrôler là où elles vont aller et la façon dont elles vont relarguer les médicaments, que ce soit par diffusion à travers la membrane ou par sa rupture », explique Anne-Virginie Salsac. Avec ses collègues, la biomécanicienne a développé une nouvelle technique numérique pour simuler le comportement d’une capsule dans un écoulement sanguin. Et ils ont montré que c’est en jouant sur les différentes propriétés mécaniques d’une capsule (taille, élasticité, forme, porosité…) qu’on pourra maîtriser la délivrance du médicament.

Traiter le syndrome de détresse respiratoire aiguë

Il est une maladie en particulier pour laquelle la mécanique des fluides pourrait être d'une aide précieuse : le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), une inflammation des poumons qui provoque la mort de plus de 10 000 personnes chaque année en France. Un traitement existe pour soulager les malades : il consiste à injecter dans les poumons, via la trachée, un liquide appelé "surfactant", afin qu'ils puissent se gonfler plus facilement. Ce traitement est largement utilisé pour soigner les bébés prématurés qui souffrent de ce syndrome, car le surfactant naturel leur fait souvent défaut, et a permis de faire chuter significativement la mortalité des nourrissons. En revanche, les essais chez les adultes se sont révélés à ce jour inefficaces.

Les travaux d’une équipe de chercheurs internationale pourraient néanmoins changer la donne. Ces derniers ont mis au point le premier modèle numérique qui simule l’écoulement de surfactant dans les poumons. Grâce à ce modèle, ils sont parvenus à expliquer pourquoi la thérapie est un succès chez les nourrissons, alors qu’elle a échoué jusqu’ici chez les adultes. Et ils ont montré qu’en réalité il était possible d’utiliser aussi ce traitement chez l’adulte4.

Répartition de surfactant dans les bronches Chez les patients adultes atteints du syndrome de détresse respiratoire aigüe, l’injection de liquide surfactant destinée à aider les poumons à se gonfler s’est révélée jusqu’à présent inefficace. Et pour cause : la modélisation des écoulements montre que la répartition du surfactant n’est pas uniforme dans l’arbre bronchique (ici à l’image).

« La différence fondamentale entre les poumons d’un nourrisson et ceux d’un adulte, c’est leur taille, explique Marcel Filoche, du Laboratoire de physique de la matière condensée5 à Palaiseau, un des auteurs de ces travaux. Lorsqu’on injecte du surfactant à un bébé, le liquide n’a pas trop de difficulté à se répandre dans l’ensemble de l’arbre respiratoire, de la trachée jusqu’aux minuscules alvéoles pulmonaires. Chez l’adulte, c’est différent. Pour une dose de médicament donnée, si le volume de liquide est trop petit, il n’atteindra pas l’extrémité du réseau pulmonaire. » C’est précisément ce qui s’est passé lors des essais de cette thérapie et qui explique leur échec.

Le modèle développé par les chercheurs met ainsi en évidence toute l’importance du volume à injecter au patient pour assurer le succès du traitement ; il pointe également d’autres paramètres cruciaux à prendre en compte : la vitesse d’injection, la densité du liquide, sa viscosité, mais aussi la position du patient dans l’espace, la gravité aidant le surfactant à diffuser dans les poumons en fonction de l’angle des différents embranchements pulmonaires.« Nos résultats vont permettre de rouvrir d’ici quelques années une voie thérapeutique abandonnée », se réjouit Marcel Filoche. Mieux encore : avec ce modèle, il sera possible d’adapter le traitement à chaque patient. Une fois la géométrie des poumons de chacun connue par imagerie médicale, il suffira de simuler l’écoulement de surfactant dans son système respiratoire. Et de déterminer ensuite les paramètres (volume, densité, viscosité, etc.) qui aboutiront au meilleur résultat possible. La mécanique des fluides n’a pas fini de faire progresser la médecine.

 

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MACHINES ET MOTEURS MOLÉCULAIRES : DE LA BIOLOGIE AU MOLÉCULES DE SYNTHÈSE

 

 

 

 

 

 

 

MACHINES ET MOTEURS MOLÉCULAIRES : DE LA BIOLOGIE AU MOLÉCULES DE SYNTHÈSE


De nombreux processus biologiques essentiels font intervenir des moteurs moléculaires (naturels). Ces moteurs sont constitués de protéines dont la mise en mouvement, le plus souvent déclenchée par l'hydrolyse d'ATP (le "fioul" biologique), correspond à une fonction précise et importante. Parmi les exemples les plus spectaculaires, nous pouvons citer l'ATPsynthase, véritable moteur rotatif responsable de la fabrication de l'ATP. Pour le chimiste de synthèse, l'élaboration de molécules totalement artificielles, dont le comportement rappelle celui des systèmes biologiques, est un défi formidable. L'élaboration de "machines" et "moteurs" moléculaires de synthèse représente un domaine particulièrement actif, qui a vu le jour il y a environ une douzaine d'années. Ces machines sont des objets nanométriques pour lesquels il est possible de mettre en mouvement une partie du composé ou de l'assemblée moléculaire considérée, par l'intervention d'un signal envoyé de l'extérieur, alors que d'autres parties sont immobiles. Si une source d'énergie alimente le système de manière continue, et qu'un mouvement périodique en résulte, l'assemblée moléculaire en mouvement pourra être considérée comme un "moteur". D'ores et déjà, certaines équipes de chimiste ont pu fabriquer des moteurs rotatifs minuscules, des moteurs linéaires mis en mouvement par un signal électronique ou des "muscles" moléculaires de synthèse, capables de se contracter ou de s'allonger sous l'action d'un stimulus externe. Quelques exemples représentatifs seront discutés lors de l'exposé. Un certain nombre de questions ayant trait aux applications potentielles du domaine de "nanomécanique moléculaire" seront abordées : - "ordinateurs moléculaires", pour lesquels certains chercheurs fondent de grands espoirs, stockage et traitement de l'information au niveau moléculaire, - robots microscopiques, capables de remplir une grande variété de fonctions allant de la médecine à la vie de tous les jours, - transport sélectif de molécules ou d'ions à travers des membranes.

Transcription de la 613e conférence de l'Université de tous les savoirs donnée le 20 juin 2006 revue par l'auteur.

Jean Pierre Sauvage : « Machine et moteurs moléculaires : de la biologie aux molécules de synthèse »

De nombreux processus biologiques essentiels font intervenir des moteurs moléculaires naturels. Ces moteurs sont constitués de protéines dont la mise en mouvement, le plus souvent déclenchée par l'hydrolyse d'ATP (le « fuel » biologique), correspond à une fonction précise et importante. Parmi les exemples les plus spectaculaires, nous pouvons citer l'ATPsynthase, véritable moteur rotatif responsable de la fabrication de l'ATP. Pour le chimiste de synthèse, l'élaboration de molécules totalement artificielles, dont le comportement rappelle celui des systèmes biologiques, est un défi formidable.

L'élaboration de « machines » et « moteurs » moléculaires de synthèse représente un domaine particulièrement actif, qui a vu le jour il y a environ une douzaine d'années. Ces machines sont des objets nanométriques pour lesquels il est possible de mettre en mouvement une partie du composé ou de l'assemblée moléculaire considérée, par l'intervention d'un signal envoyé de l'extérieur, alors que d'autres parties sont immobiles. Si une source d'énergie alimente le système de manière continue, et qu'un mouvement périodique en résulte, l'assemblée moléculaire en mouvement pourra être considérée comme un « moteur ». D'ores et déjà, certaines équipes de chimistes ont pu fabriquer des moteurs rotatifs minuscules, des moteurs linéaires mis en mouvement par un signal électronique ou des « muscles » moléculaires de synthèse, capables de se contracter ou de s'allonger sous l'action d'un stimulus externe.

Quelques exemples représentatifs seront discutés et un certain nombre de questions ayant trait aux applications potentielles du domaine de « nanomécanique moléculaire » seront abordées.

Qu'entend-on par machine et moteur moléculaires ? Et quels sont les systèmes naturels étudiés ?

Une machine moléculaire est un système dynamique comportant plusieurs constituants et capable de subir des mouvements réversibles de grande amplitude. Ces mouvements sont contrôlés par un signal extérieur (le signal peut être photonique, électronique ou chimique).

Il existe 3 catégories de machines moléculaires :

-les protéines moteurs (en biologie): ce sont des moteurs rotatifs, comme l'ATPsynthase ou les flagelles des bactéries qui permettent leur locomotion, des moteurs linéaires (les muscles, la kinésine ou la dynéine), ou encore des presses, comme la famille des chaperons (les chaperons sont capables d'encapsuler et de comprimer des protéines dénaturées pour leur redonner la bonne conformation).

-les systèmes hybrides : ce sont des systèmes développés par des biologistes, souvent en association avec des chimistes et des ingénieurs, comportant des fragments naturels et éventuellement des éléments artificiels issus de la chimie de synthèse.

-les molécules ou assemblées moléculaires totalement artificielles : c'est ce à quoi nous nous intéresserons plus particulièrement.

Détaillons un exemple de moteur moléculaire (de la catégorie des protéines moteurs), l'ATPsynthase schématisée figure 1. L'ATPsynthase est une enzyme universelle (nous pouvons la trouver chez les bactéries les plus primitives ainsi que chez les mammifères : elle est présente dans tous les organismes vivants). Elle est responsable de la fabrication de l'ATP (Adénosine TriPhosphate) à partir d'ADP (Adénosine DiPhosphate) et de phosphate inorganique. L'ATP représente un véritable « fuel » biologique qui permet le stockage énergétique dans la cellule (nous fabriquons chaque jour la moitié de notre poids en ATP !).

Figure 1 : l'ATPsynthase est un moteur rotatif merveilleux

Figure 2 : la rotation du rotor g à l'intérieur de la roue
a3b3 a été mise en évidence en attachant un
filament d'actine à une extrémité et en alimentant
le système en ATP

Lorsqu'une solution d'ATP est ajoutée, le groupe japonais a pu remarquer que le filament d'actine (qui a été modifié de telle façon à être rendu luminescent) tourne dans le sens inverse des aiguilles d'une montre : l'ATPsynthase a agi comme un moteur rotatif réalisant l'hydrolyse de l'ATP en ADP et en phosphate inorganique, c'est à dire la réaction inverse de celle produisant l'ATP.

Ce groupe a donc mis en évidence que nous avons un « fuel », l'ATP, dont la conversion
engendre un mouvement de rotation pour un moteur moléculaire très complexe issu de la
biologie, mais qui peut être classé comme un moteur hybride.

Il existe d'autres protéines moteurs qui sont des moteurs linéaires :

-la kinésine et la dynéine : elles sont responsables du transport de la matière dans les cellules, dans des organelles (sortes de « sacs » présents sur la kinésine). La kinésine bouge très vite (300-400 km/h si l'on ramène l'échelle à celle d'une personne courant sur une piste de stade).

-les muscles striés : ils se contractent ou s'allongent grâce à des filaments (actine : filament fin / myosine : filament épais) qui coulissent les uns le long des autres.

Les molécules de synthèse

De manière générale, l'élaboration de molécules artificielles a beaucoup évolué. Il reste cependant des défis inaccessibles aujourd'hui.

Certaines substances naturelles très complexes peuvent être synthétisées au laboratoire, comme la brévétoxine A (figure 3). Cette molécule présente un grand nombre de carbones asymétriques (22). Elle a été préparée par un groupe américain et a nécessité le travail de 20 personnes sur une période d'environ 12 ans. Cette synthèse représente un véritable tour de force, salué par la communauté des chimistes des molécules.

Figure 3 : le groupe américain de K.C. Nicolaou a réalisé la synthèse totale
de la brévétoxine A
Mais pour le moment, aucune équipe n'est parvenue à synthétiser la maitotoxine (figure 4), substance naturelle comprenant environ une centaine de carbones asymétriques.

Figure 4 : la maitotoxine, un des poisons marins les plus violents, n'a pas encore pu être synthétisée au laboratoire

Les moteurs et machines moléculaires artificiels : caténanes et rotaxanes

Les caténanes et les rotaxanes (figure 5) sont devenus très populaires dans le domaine de la recherche contemporaine (véritable révolution au cours des 20 dernières années) et sont beaucoup étudiés par les chimistes, les physiciens et les ingénieurs pour leur potentiel dans la fabrication de machines moléculaires.

Figure 5 : schéma d'un [2]caténane et d'un [2]rotaxane
Jusqu'au début des années 1980, ces composés semblaient inaccessibles car il n'existait pas de méthode de synthèse, puis une méthode a été découverte (figure 6) : elle met en Suvre l'effet de matrice d'un métal de transition, le cuivre (I), afin d'entremêler 2 fils moléculaires par exemple pour obtenir un précurseur qui permettra ensuite de fabriquer un [2]caténane.

Figure 6 : stratégie pour entremêler 2 fragments moléculaires afin de préparer un [2]caténane

Sur la figure 6, nous avons 2 fragments moléculaires f-f capables d'interagir avec un centre métallique (cation métallique susceptible de rassembler et d'orienter ces 2 fragments). Nous obtenons alors un intermédiaire, comportant deux fils f-f entremêlés, conduisant au [2]caténane par une réaction chimique classique de formation d'anneau.

Traitons un exemple concret pour illustrer cette stratégie : la formation d'un entrelacs de 2 fils moléculaires dppOH (dihydroxyphénylphénanthroline) grâce au cation métallique Cu (I) (figure 7), entrelacs réalisé par Dietrich-Buchecker et al., en 1984.

Figure 7 : réalisation d'un entrelacs de 2 fragments organiques grâce à
l'effet de matrice du cuivre (I)
Le cuivre existe sous 2 états :
-un état oxydé : c'est le cuivre (II) ou Cu2+
-un état réduit : c'est le cuivre (I) ou Cu+.
C'est le cuivre dans son état réduit qui a été utilisé ici et qui est toujours utilisé pour réaliser un entrelacs de ce type.

Une fois l'entrelacs effectué, une réaction de chimie classique est mise en Suvre afin de synthétiser le [2]caténane (figure 8).

Figure 8 : formation du [2]caténane par une réaction chimique classique

Figure 9 : structure cristallographique du
[2]caténane complexé au cuivre

Les deux anneaux étant entrelacés, la seule manière de les séparer est de couper un lien chimique. Il est possible de retirer le cuivre (I) en réalisant ce qu'on appelle la démétallation (figure 10).

Figure 10 : il est facile de retirer le centre métallique en utilisant du cyanure de potassium

Figure 11 : la molécule se réarrange
pendant la démétallation

La première machine moléculaire à partir d'un caténane :

La première machine moléculaire réalisée à partir d'un [2]caténane est un moteur rotatif dont le mouvement est déclenché par l'oxydation et la réduction du cuivre (figure 12). Il faut cependant noter que ce n'est pas un véritable moteur rotatif, dans la mesure où la direction des deux demi-tours représentés sur la figure 12 n'est pas contrôlée.

Figure 12 : rotation d'un anneau à l'intérieur d'un autre anneau, sans contrôle de la
direction : utilisation du couple Cu(II) / Cu(I)

Le cuivre (I) est stable lorsqu'il est entouré de 4 atomes donneurs (atomes d'azote) : il présente une géométrie pseudo-tétraédrique lors de la coordination à deux phénanthrolines (chacune a 2 atomes d'azote).
Le cuivre (II) n'est lui par contre pas stable en pseudo-tétraèdre, il préfère être entouré de 5
atomes donneurs : une phénanthroline et une terpyridine (respectivement 2 et 3 atomes
d'azote).
Lorsque le cuivre (I) est oxydé (-e-) en cuivre (II), nous passons d'une situation stable (en haut à gauche) à une situation instable (en haut à droite). Le système instable va évoluer (se relaxer) et la relaxation implique qu'un des deux anneaux tourne à l'intérieur de l'autre anneau. Ceci s'effectue de manière à venir placer le fragment à 3 azotes (terpyridine) en position d'interaction avec le cuivre : le système retrouve alors une situation stable (en bas à droite). Ce réarrangement a été réalisé en effectuant une rotation d'un demi-tour.
Le système est réversible, ce qui signifie qu'il est possible de réduire (+e-) le cuivre (II) en cuivre (I) pour revenir à la situation de départ (en haut à gauche), en passant par un système instable (en bas à gauche).

Ce moteur rotatif est donc fondé sur un mouvement contrôlé par électrochimie et le système est parfaitement réversible : il est possible de faire autant de cycles CuI à CuII à CuI que l'on veut.

Une navette moléculaire à partir d'un rotaxane :

Nous avons vu qu'un rotaxane pouvait être un moteur rotatif ou un moteur linéaire. Le groupe de Fraser Stoddart, aux Etats-Unis, a préparé une navette moléculaire (figure 13) à partir d'un rotaxane, c'est un moteur linéaire.

Figure 13 : schématisation d'une navette moléculaire

C'est un processus électronique qui permet de faire coulisser l'anneau d'une station vers l'autre (figure 14).

Figure 14 : une « navette » moléculaire :la mise en mouvement se fait en
oxydant la station verte puis en réduisant sa forme oxydée

Ce processus est réversible puisqu'il est possible de revenir à la situation de départ en réduisant la station verte, c'est à dire en revenant à sa forme neutre du point de vue des charges.
Cette navette moléculaire et des molécules dérivées de sa structure originelle ont conduit à des applications qui peuvent être importantes : des chimistes se sont associés à des ingénieurs et à des physiciens pour tenter de fabriquer des systèmes de stockage d'information (mémoires) et des ordinateurs primitifs à base moléculaire.

Peut-on mettre en Suvre un système de stockage de l'information moléculaire en utilisant une navette moléculaire ?

Figure 15 : découverte de l'année 2001, publiée dans le magazine Science, vol. 294, 21
décembre 2001, p. 2442 : nous dirigeons-nous vers des ordinateurs moléculaires ?

Le système qui a été élu « découverte de l'année 2001 » par le magazine Science (figure 15) pourrait donner naissance à un ordinateur moléculaire, permettant le stockage de l'information.
Ce dispositif est composé de barreaux de semi-conducteur ou d'un métal conducteur : 3 barreaux en haut et 3 barreaux en bas, positionnés de manière orthogonale. Entre ces barreaux ont été intercalées des molécules de la navette moléculaire. Lorsqu'un potentiel est appliqué entre deux barreaux perpendiculaires, la position de l'anneau (représenté en blanc sur la figure) peut être contrôlée. Dans le même temps, les propriétés de conduction de l'électricité du filament organique sont modifiées. Ainsi, selon la position de l'anneau sur le filament organique, nous avons un conducteur (qui peut être considéré comme le 1 d'un système informatique) ou un isolant (qui est alors le 0). L'état du fil organique reliant les barreaux peut être « lu ». Il est également possible d' « effacer » afin de revenir à l'état initial.
Nous avons donc un système permettant le stockage de l'information, à base moléculaire. Il faut cependant noter que ce petit dispositif fait encore l'objet de nombreuses discussions et débats.

Vers des muscles moléculaires de synthèse à l'échelle nanométrique :

Il est possible de mimer les moteurs linéaires que sont les muscles. Cela a été réalisé par Maria Consuelo Jiménez et Christiane Dietrich-Buchecker qui ont cherché à imiter le fonctionnement du muscle strié en préparant un dimère de rotaxane (figure 16). Dans ce dimère de rotaxane, les filaments vont pouvoir coulisser l'un sur l'autre pour conduire à une forme contractée ou à une forme étirée.

Figure 16 : un dimère de rotaxane est la topologie idéale pour réaliser l'interconversion d'une structure étirée et d'un système contracté. L'axe d'une sous-unité (bleue, par exemple) traverse l'anneau de l'autre sous-unité (noire)

La synthèse du muscle est un réel défi, proche du point de vue de la difficulté, de celui que peut représenter la synthèse de produits naturels complexes. C'est la coordination au métal qui détermine le fait qu'il soit étiré ou contracté. L'étape clé de la préparation du muscle est la réaction de double « enfilage » (figure 17). La structure doublement entrelacée de ce composé a été mise en évidence par diffraction des rayons X (figure 18).

Figure 17 : formation du dimère de rotaxane par double enfilage au cuivre (I)

Figure 18 : structure cristallographique du
composé doublement entrelacé

La mise en mouvement du muscle est réalisée par une réaction d'échange cuivre (I) / zinc (II) (figure 19).
Comme nous l'avons vu précédemment, le cuivre (I) est stable lorsqu'il est tétracoordiné : sa sphère de coordination est composée de 2 phénanthrolines, c'est la forme étirée (85 Angström). Le mouvement est induit par échange du cuivre (I) par du zinc (II) qui, lui, est stable lorsqu'il est pentacoordiné (géométrie de bipyramide trigonale) : sa sphère de coordination comprend une phénanthroline et une terpyridine, c'est la forme contractée (65 Angström).
L'amplitude est à peu près la même que celle que nous trouvons dans les muscles striés (myosine / actine) : la contraction est d'environ 25 % de la longueur totale de l'objet dans la forme étirée.

Figure 19 : les deux états du muscle

Il est donc possible de contracter ou d'étirer une molécule par une réaction chimique, de manière très substantielle. La mise en mouvement d'objets ou de particules beaucoup plus grands que cette espèce suscite actuellement beaucoup d'intérêt.

Les moteurs et machines moléculaires fondés sur des molécules non entrelacées : un exemple de système mis en mouvement par la lumière

Plusieurs machines moléculaires ont été proposées par différents laboratoires, qui travaillent sur des composés qui ne comportent pas d'anneaux entrelacés. Nous discuterons brièvement un exemple précis, conduisant à un véritable dispositif micrométrique.
Un groupe de chercheurs hollandais (Feringa et al.) a publié en 2006, dans la revue Nature, un article à propos d'un nanomoteur qui engendre la rotation d'objets de l'ordre du micron. Il s'agit en fait d'un moteur moléculaire intégré dans un film de cristal liquide (figure 20) qui utilise la lumière pour faire tourner des objets de grande taille, par comparaison à celle du moteur moléculaire lui-même.

Figure 20

Le groupe de Feringa a déposé un barreau de verre (5x28mm) sur ce film de cristal liquide dopé. Sous irradiation lumineuse, le petit barreau est entraîné et il est possible de visualiser clairement la rotation, ce qui constitue une très jolie preuve de principe.

Finalement, quelles sont les motivations des chercheurs travaillant dans le domaine des machines et moteurs moléculaires de synthèse ?

Tout d'abord, la fabrication de tels objets, molécules ou dispositifs, représente un véritable défi synthétique : les molécules pouvant donner naissance à un moteur ou à une machine moléculaire sont complexes et originales. Leur synthèse nécessite beaucoup de temps et de talent. Leur obtention représente un véritable exploit, que ce soit au niveau conceptuel ou du point de vue expérimental.

Ensuite, c'est la possibilité de reproduire les fonctions les plus simples des moteurs biologiques qui attire les chercheurs. Il faut cependant noter que les machines moléculaires accessibles aujourd'hui sont extrêmement primitives, comparées aux machines naturelles très complexes mises au point par la nature au cours de l'évolution.

Pour finir, ce sont certainement les nombreux domaines d'applications possibles qui captivent également les chercheurs :

-le stockage et le traitement de l'information au niveau moléculaire (écrire / lire / effacer)
-la mise au point de robots microscopiques capables d'assurer des fonctions variées
-en chimie médicinale : le transport d'une molécule jusqu'à un endroit précis ou celle-ci sera utile (médicament), l'ouverture / la fermeture d'une valve ou d'une porte qui contrôle le flux d'une molécule dans un fluide biologique, le pilotage d'une micro-seringue susceptible d'injecter un composé dans une cellule...

Remerciements

Caténanes :

-synthèse et chimie de coordination :
Laboratoire de Chimie Organo-Minérale (Strasbourg) :
Christiane Dietrich-Buchecker, Jean-Claude Chambron, Jean-Marc Kern, et beaucoup
d'autres...
-structures cristallographiques par diffraction des rayons X :
Claudine Pascard, Michèle Césario (Gif-sur-Yvette)
Jean Fischer, André De Cian, Nathalie Gruber, Richard Welter (Strasbourg)

Mouvement de caténanes et rotaxanes complexés au cuivre :

-catenanes in motion :
Aude Livoreil, Diego J. Cardenas
-translation of a ring along an axle:
Jean-Paul Collin, Pablo Gaviña
-pirouetting of a ring along the axle:
Laurence Raehm, Jean-Marc Kern, Ingo Poleschak, Ulla Létinois, Jean-Paul Collin
-towards molecular muscles :
Maria Consuelo Jiménez, Christiane Dietrich-Buchecker

 

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